Culture / Tradition

Evala 2022 en pays kabyè : Fin des luttes dans la bonne ambiance

Empoignades avec détermination mais fair play absolu
Evala 2022 en pays kabyè : Fin des luttes dans la bonne ambiance

Les luttes traditionnelles Evala édition 2022 en pays kabyè, démarrées le 9 juillet 2022, ont pris fin, samedi dernier, avec les finales dans les cantons de Tcharè, Soumdina et Lassa. La veille, les confrontations finales avaient été enregistrées dans quatre cantons à savoir : Kouméa, Landa, Lama et Djamdè.

Le chef de l’Etat, Faure Essozimna Gnassingbé était représenté dans certaines localités par le ministre d’Etat, ministre de l’Administration territoriale, Payadowa Boukpessi et dans d’autres par le président de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC), Télou Pitalounani. Partout, la mobilisation était à la hauteur de l’envie de combler la nostalgie des deux années de suspension pour cause de la pandémie mondiale au coronavirus et l’ambiance sur un air de liesse populaire.

Loge officielle à la finale de Lassa avec les représentant du chef de l’Etat Télou et Boukpessi (2è et 3è au 1er plan, de la gauche)

L’édition 2022 des luttes traditionnelles Evala en pays kabyè est rentrée définitivement dans l’histoire. Après la série de finales dans les cantons de Kouméa, Landa, Lama et Djamdè vendredi, la boucle est bouclée samedi par les dénouements à Tcharè, Soumdina et Lassa. A Kouméa, Lama, Tcharè et Lassa, le président de la République s’est fait représenter par le ministre de l’Administration territoriale, de la Décentralisation et du Développement des Territoires, Payadowa Boukpessi. A Landa, Djamdè et Soumdina, les luttes se sont déroulées, en présence du président de la HAAC, Télou Pitalounani, envoyé du chef de l’Etat. Sur tous les terrains, on notait également la présence des membres du gouvernement et autres autorités, ainsi que des cadres natifs de chaque milieu.

L’ambiance autour des arènes était entretenue par des supporters et encadreurs qui chantaient et dansaient, pour vanter et encourager les lutteurs, mais aussi, témoigner leur reconnaissance au chef de l’Etat pour sa politique de valorisation des us et coutumes.

De nombreux touristes qui ont été privés de ce spectacle pendant deux ans, n’ont pas voulu se faire conter l’événement. Témoins des manifestations dans toutes les arènes, ils n’ont pas du tout boudé leur plaisir, tant les empoignades étaient d’une technicité admirable et ont livré les verdicts suivants dans les dernières confrontations.

Samedi, sur le terrain de l’EPP Ahodo, les lutteurs de Lassa bas ont remporté la partie avec 19 victoires contre 11 pour Lassa haut. Les cadets de Lassa bas ont emboité les pas de leurs aïnés en gagnant par 12 points contre 5 pour Lassa haut. Avant Lassa, la finale du canton de Soumdina qui a eu pour cadre le terrain de l’école officielle de Sétidè a tourné à l’avantage des Evala de Soumdina bas qui ont terrassé 19 fois contre 16 pour les hommes de haut chez les Evala. La même dynamique gagnante est maintenue par les petits frères où Soumdina bas a dominé le haut par 14 victoires contre 5. Plus tôt dans la matinée, sur le terrain de l’USP de Tcharè, les forgerons de Wyamdè ont remporté le duel cantonal, en s’imposant par 17 victoires contre 15 les potiers de Tcharè, chez les Evala. Côté Ahoza, les rouges de Tcharè vont renverser la tendance en gagnant par 12 points contre 10 pour les blancs de Wyamdè.

Quatre finales toutes aussi alléchantes la veille

Prise et renversement plus par technique que force physique

La veille, sur le terrain du Lycée de Kouméa, la coalition Kèwèyè regroupant Karè, Sondè, Lohou, Mandela et Sèdina a dominé celle de Piyou composée de Laouda, Fèouda, Piyo, Houdè, Kpatayou, Tchoïda et Namdina par 24 victoires contre 13 chez les Evala et par 10 contre 9 côté Ahoza. A Landa, sur le terrain du Centre artisanal féminin, la coalition Kassi-Déwa-Landa a gagné celle de Kadja-Houloung-Kpagalo sur une courte victoire de 21 points contre 20 chez les Evala. Par contre, elle a mordu la poussière côté Ahoza par 21 défaites contre 15. Sur le terrain du Lycée de Lama, Lama haut a été impuissant devant Lama bas qui a remporté la finale par 33 victoires contre 22. La confrontation entre Djamdè haut et Djamdè bas s’est déroulé sur le terrain du CEG de la localité. Aux termes d’âpres explications, c’est Djamdè haut qui a su tirer son épingle du jeu, en renversant 9 lutteurs de Djamdè bas contre 6 défaites au niveau des Evala. Chez les jeunes Ahoza, la victoire a changé de camp et les cadets de Djamdè bas ont été meilleurs face à leurs homologues du haut battus par 22 victoires contre 15.

Partout, les lutteurs ont su démontrer aux yeux du public leur potentiel physique, technique et moral, en se défendant avec bravoure et témérité, mais surtout avec beaucoup de courage et de fair-play. Car loin d’être un simple sport, les luttes traditionnelles représentent pour le jeune Kabyè une école d’initiation dans l’échelle sociale.

Le fraternel combat intergénérationnel

Fête initiatique et véritable trait d’union intergénérationnel, Evala est une superbe école pour le jeune Kabyè, où les valeurs identitaires, physiques et morales lui sont inculquées pour développer son schème transcendantal, avant son intégration dans la classe des adultes. Fête annuelle de la force physique, de la ruse et de l’endurance, les luttes traditionnelles en pays kabyè constituent l’une des plus grandes manifestations initiatiques spectaculaires et saisissantes des jeunes garçons au Togo.

Cette année encore, dans le strict respect des gestes barrières contre la Covid-19 édictées par le gouvernement, des centaines de jeunes hommes se sont réunis sur les places publiques dédiées pour éprouver leur force, leur agilité et leurs techniques. Loin d’être une guerre, c’est plutôt un fraternel combat psychologique. Dans la mesure où, c’est à travers ces manifestations que les jeunes initiés de la même génération se découvrent, mesurent leur capacité physique de futurs défenseurs de la cité en cas d’agression. Cette initiation du jeune garçon kabyè à l’âge de 18 ans lui ouvre la marche des escaliers hiérarchiques de la société kabyè. C’est cette entrée qui lui attribue le nom de « nouvel homme » que signifie « Evalou », singulier de « Evala » et lui donne le droit, entre autres, de consulter pour rechercher les causes d’un malheur dans la famille, de donner l’eau viatique à un défunt, de prendre les armes pour défendre la communauté en danger, de se marier pour fonder un foyer.

Faustin LAGBAI

 

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