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Quels enjeux pour une bonne gouvernance démocratique en Afrique ?

L'assistance suivant attentivement le développement du thème de la conférence d'actualité par Dr.Tonyémé (à gauche).
Quels enjeux pour une bonne gouvernance démocratique en Afrique ?

La Direction de la Recherche et de l’Innovation de l’Université de Lomé (UL), a organisé, jeudi 24 février 2022, au campus universitaire, une Conférence d’actualité sur le thème : « l’ethnie et le pouvoir politique en Afrique ». Thème développé par M. Bilakani Tonyémé, maître de conférences à l’UL, auteur d’un ouvrage qui traite de la thématique ayant mobilisé une foule nombreuse d’enseignants et d’étudiants. Dans un premier temps, le conférencier a démontré le lien entre les considérations ethniques et l’organisation, la gestion sociopolitique des Etats en Afrique, les mécanismes de fonctionnement de ce lien, avant de proposer des pistes de solutions pour une bonne gouvernance dans les pays africains.

L’ethnie est généralement définie comme un groupement d’individus appartenant à la même culture (même langue, même coutume) et se reconnaissant comme tel, a expliqué Dr Tonyémé, à l’entame de la conférence. Pour lui, il existe un lien potentiel et explosif entre les considérations ethniques et la gestion sociopolitique dans les Etats d’Afrique. On constate alors une prégnance de l’ethnicité dans la sphère de la vie politique. Des appartenances ethniques stigmatisées et accusées d’être à l’origine des affrontements politiques qui enlisent beaucoup de pays en Afrique.

L’ethnie au cœur du pouvoir politique en Afrique

Le conférencier précise que les nominations à des hauts postes de responsabilité sont faites sur des bases ethniques, de même que les recrutements et les promotions dans les services publics, parapublics et même privés. Une pratique perçue négativement dans les Etats modernes, mais dont on s’en sert en Afrique pour accéder au pouvoir, souligne-t-il. Même si, les discours politiques disent une chose, la réalité est autre. Les ethnies sont instrumentalisées avec la création des bastions et réseaux identitaires. Ce qui participe à la promotion des Etats unitaires, centralisés qui confient la gestion des affaires publiques à ces groupes identitaires, laissant de côté la notion de la compétence. Aux dires de l’orateur, c’est la cause essentielle du ratage de la démocratie africaine. De même, les luttes politiques deviennent des luttes ethniques, les conquêtes démocratiques synonymes de facto, de résurgence des conflits ethniques, fragilisent la démocratie naissante et la viabilité des Etats. Cette manière de gérer les affaires de l’Etat, de l’avis du conférencier, a été héritée des colonisateurs qui avaient pour stratégie, d’opposer les groupes ethniques pour les affaiblir et pouvoir les gouverner. La mobilisation ethnique pour la conquête du pouvoir étant d’actualité, il est donc question d’établir une relation entre ethnie et démocratie pour une bonne gouvernance dans les pays africains.

Transcender les appartenances ethniques sans vouloir les détruire

Pour concilier l’ethnicité et la démocratie, le conférencier a exposé l’approche des tenants d’un Etat multilatéral qui stipulent que l’organisation et la gestion des Etats doivent se baser sur les ethnies. Ainsi, le pacte social sera remplacé par un pacte entre les entités ethniques, et l’alternance se fera entre les ethnies. Après avoir démontré les pièges et les insuffisances de ce type d’Etat, M. Bilakani Tonyémé propose un Etat démocratique au-delà des ethnies. Selon lui, c’est un Etat qui doit transcender les appartenances ethniques, sans vouloir les détruire. Il doit amener les ethnies à vouloir vivre ensemble à travers des idéaux et des projets sociaux unificateurs pour la construction nationale. Ces projets sociaux doivent permettre aux citoyens d’accéder aux avantages auxquels ils ne pourraient pas, s’ils ne sont pas membres de l’identité nationale. A cet effet, les gouvernants doivent envisager un Etat démocratique basé sur l’intérêt général dans lequel chaque citoyen et chaque groupe ethnique se retrouvent dans une tendance qui ne pourrait être renversée, a-t-il précisé.

Un riche et long débat a suivi portant, entre autres, sur la notion d’africanisme, le caractère tabou de la question d’ethnie au Togo, la prégnance de l’ethnie dans les services, la décolonisation de la politique an Afrique, la contribution des milieux intellectuels pour changer cette prédominance ethnique dans la gestion des affaires publiques et privées.

Vincent K. HOEDANOU

 

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