Les appareils électriques et électroniques, en fin de vie, deviennent des déchets encombrants. Entassés dans les ateliers de dépannage ou abandonnés dans des coins de maisons, certains de ces déchets sont, malheureusement, jetés sur les décharges sauvages, constituant, dans tous les cas, une menace sanitaire et environnementale, en raison des métaux lourds et des gaz toxiques qu’ils contiennent. Aussi, une gestion rationnelle de ces déchets s’impose-t-elle, afin de mettre les populations hors de tout danger.
Les déchets électriques et électroniques constituent l’un des soucis majeurs des villes africaines. Ces déchets regroupent un ensemble d’équipements tels que les postes téléviseurs en pannes, les réfrigérateurs hors d’usage, le matériel informatique tel que les ordinateurs, les onduleurs, etc. Les climatiseurs, les ampoules électriques, de même que les piles abandonnées, sont entre autres, les éléments qui forment ces déchets que l’on retrouve entassés dans des ateliers de réparation, sur les dépotoirs ou dans les coins de maisons. En dépit des efforts déployés par les autorités pour assainir le cadre de vie, la gestion de ces déchets fait partie des soucis majeurs dans la ville de Lomé, à cause du manque de structures spécialisées pour leur gestion.
En effet, selon les spécialistes, les déchets d’origine électriques ou électroniques doivent être traités d’une façon spéciale et avec précaution, à cause des substances dangereuses qu’ils contiennent. De l’avis de M. Armand Eklou de l’Action Sociale pour le Développement Intégrale (ASDI), la seule ONG spécialisée dans le recyclage desdits déchets à Lomé, les dangers liés aux déchets électroniques sont à prendre au sérieux car, ils menacent sérieusement la santé humaine et l’environnement : « Les déchets électriques et électroniques contiennent des substances hautement dangereuses telles que les Polluants Organiques Persistants (POP), les métaux lourds comme le plomb, le lithium, le mercure, etc. dont les effets sur la santé des populations ne sont plus à démontrer », a-t-il déclaré. Ces déchets, dit-il, contiennent aussi des substances de valeurs comme le cuivre, l’or et l’indium, dont le recyclage permet d’éviter le gaspillage, de protéger les ressources en eau potable et l’environnement, pour les générations futures.
L’assistant du directeur exécutif de l’ASDI explique qu’à Lomé, la collecte est souvent faite par les ramasseurs d’objets usés et des ferrailles appelés généralement « Gakpo gblégblé ». Certains de ces déchets dangereux sont jetés sur des dépotoirs et les enfants les ramassent, les manipulent à la recherche des substances utiles et ceci, sans aucune protection. Ces enfants, dit-il, courent ainsi des risques énormes pour leur santé. C’est donc pour mettre la population hors de ces dangers que ASDI a initié, depuis 2012, des collectes professionnelles et des campagnes de recyclage des déchets électriques et électroniques : « ASDI a pour ambition de mettre en place un système de sensibilisation et de collecte efficace desdits déchets, de les démanteler, pour, ensuite, valoriser les différentes parties, dans le but de générer suffisamment de fonds et de créer des emplois », a expliqué M. Eklou.
A ce jour, l’ONG a collecté plus de 15000 tonnes de déchets. Certains sont traités sur place et d’autres envoyés à des partenaires en Europe, pour être recyclé.
Afin d’amener la population à prendre conscience des dangers liés à ces déchets, ASDI mène des séances de sensibilisation et organise des formations à l’intention des électroniciens et tous ceux qui travaillent sur les appareils électriques ou électroniques, pour leur permettre d’accomplir leur travail sans trop de risques sanitaires.
Les risques liés aux déchets
Les appareils électriques ou électroniques, sont d’une grande utilité pour tous, mais lorsqu’ils cessent de travailler, leur gestion pose un sérieux problème. Selon les spécialistes, les tubes de télévisions et d’ordinateurs, par exemple, contiennent des gaz dangereux. Lorsque l’un de ces tubes se casse devant une personne, celle-ci respire ces gaz qui ont des répercussions immédiates sur sa santé. Ces substances qui s’échappent dans la nature sont à l’origine des maladies respiratoires et des cancers, selon des experts. Des scientifiques avancent que ces déchets contiennent également des métaux lourds comme le plomb, le mercure, le lithium, qui sont hautement cancérigènes. Selon eux, une femme enceinte vivant à côté d’une décharge ou d’un dépotoir sauvage, court le risque d’avoir un taux élevé de plomb dans son lait, ce qui peut entraîner des problèmes de santé pour son bébé.
Par ailleurs, aux dires de l’assistant au directeur exécutif de l’ASDI, la mauvaise gestion des déchets électriques ou électroniques ont d’énormes répercussions sur l’environnement : « lorsqu’il pleut, les polluants s’échappent des déchets abandonnés, s’infiltrent dans le sol et polluent les nappes phréatiques. Si l’on sait que nous consommons plus l’eau provenant des forages, il y a lieu de prendre toutes les précautions pour éviter la propagation de ces déchets dans la nature », a-t-il laissé entendre. Toujours au plan environnemental, les conséquences de ces déchets sont énormes. Les gaz qui s’échappent de ces objets abandonnés participent à la destruction de la couche d’Ozone, accentuant ainsi le dérèglement climatique : « la menace touche également l’agriculture et l’élevage et rendent les populations vulnérables », a relevé M. Eklou.
Le directeur de l’Observatoire Ouest-Africain de l’Environnement (OOAE), M. Ambroise Kpondjo, partage la même préoccupation. Ce dernier va plus loin en préconisant l’envoi de ces déchets dans des centres spécialisés pour être broyés en toute sécurité : « Les déchets électroniques constituent, aujourd’hui, un danger permanent pour l’environnement et pour la santé humaine. Lorsqu’un ordinateur, un post téléviseur ou une tablette en panne sont rangés au salon ou dans une chambre à coucher, ils dégagent des substances toxiques, dont l’inhalation est très dangereuse pour la santé humaine », explique-t-il.
De ce fait, les responsables de l’ASDI et de l’OOAE constatent, avec amertume, qu’aujourd’hui, ces déchets électriques ou électroniques sont renvoyés dans les pays pauvres où ils sont retraités et même par des enfants sans aucune précaution.
Au regard des conséquences que font peser les restes des équipements électroniques sur la santé humaine et sur l’environnement, il urge, de l’avis des spécialistes, que les pouvoirs publics, les entreprises et la société civile s’impliquent efficacement dans la sensibilisation pour leur manipulation et gestion responsables.
Aussi, les ONG intervenant dans le domaine, souhaitent-elles que les entreprises génératrices de ces déchets collaborent avec elles, en mettant à leur disposition les déchets pour leur traitement dans les règles de l’art.
La menace étant réelle, chacun est appelé à plus de vigilance dans la gestion desdits déchets, afin de ne pas compromettre sa santé. Les électroniciens, les dépanneurs de ces appareils électroniques et tous les acteurs sociaux doivent jouer leur partition pour enrayer ce fléau qui s’amplifie, au point de devenir l’une des menaces de premier plan pour les hommes et leur écosystème environnemental..
Ossara Koffi AGOURNA
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