
L’Institut Togolais de Recherche Agronomique (ITRA) et le Seed Systems Group (SSG) travaillent main dans la main, depuis 2022, pour assurer une fourniture continue des semences de qualité des variétés performantes aux agriculteurs. Le 16 juillet 2025, au Centre de Recherche Agronomique du Littoral (CRAL) à Davié (Préfecture de Zio), a eu lieu la remise officielle des semences souches des parents de neuf hybrides de maïs entre Dr Tchala Noudifoulè, coordonnateur régional SSG et Dr Boma Soudah, directeur dudit centre. Cette alliance marque un tournant historique pour l’agriculture togolaise, avec pour perspectives des récoltes majeures.

Dr Tchala Noudifoulè (à droite) donne des explications au directeur du Centre de Recherche Agronomique du Littoral (CRAL) à Davié, Dr Boma Soudah
Le Togo vient de franchir un cap majeur dans sa quête d’indépendance agricole en matière de souveraineté semencière. Grâce à un partenariat innovant entre l’Institut Togolais de Recherche Agronomique (ITRA) et le Seed Systems Group (SSG), le pays se dote enfin des outils nécessaires pour réduire sa dépendance aux importations de semences souches et renforcer sa souveraineté alimentaire. En effet, pendant des décennies, l’agriculture togolaise a souffert d’un handicap structurel, celui de la dépendance quasi-totale des semences souches de la plupart des variétés des cultures vivrières, par faute de création locale de variétés. Cette situation limitait non seulement l’utilisation des variétés hybrides performantes, mais entravait également le développement des capacités nationales de sélection variétale. Aujourd’hui, cette réalité appartient au passé grâce au partenariat établi entre l’ITRA et le SSG, financé par le Centre de Recherches pour le Développement International (CRDI) et l’Alliance pour une Révolution Verte en Afrique (AGRA).
Des variétés à haut potentiel enfin accessibles
A travers ce partenariat stratégique, les producteurs togolais disposent désormais de semences de grande qualité, de haute performance et résilientes face aux changements climatiques. Au cœur de cette collaboration se trouvent des innovations concrètes qui transformeront à jamais les exploitations agricoles. Il s’agit de variétés de maïs hybride « Legacy 26 », « SAMMAZ 50 » et « Opeaburoo », ainsi que le riz « Exbaika », spécialement sélectionnées pour leurs performances agronomiques, organoleptiques et, surtout pour leur adaptabilité aux conditions agro climatiques locales. La mise en œuvre de cet ambitieux partenariat ne s’arrête pas là. Déjà, une série d’essais sur de nouvelles variétés de riz et de maïs est actuellement en cours, promettant d’enrichir davantage le pool génétique des variétés performantes à disposition des agriculteurs togolais.

Vue partielle des lots de semences
Pour le directeur du Centre de Recherche Agronomique du Littoral (CRAL) de Davié, Dr Boma Soudah, l’aspect le plus révolutionnaire de ce partenariat réside dans le transfert stratégique de lignées parentales pour neuf variétés de maïs à haut rendement. Cette opération à caractère très technique représente une véritable révolution. « Elle permet à l’ITRA d’assurer localement la maintenance de ces variétés et de produire des semences hybrides à grande échelle », a-t-il souligné. « Cette approche transforme fondamentalement notre position dans la chaîne de valeur semencière. Nous passons du statut d’importateur dépendant à celui de producteur autonome », s’est-il réjoui. Dr Boma Soudah a également fait savoir que ce partenariat ne se contente pas de transférer la technologie. Celui-ci, a-t-il ajouté, repense entièrement le modèle économique de la production semencière au Togo. Il a fait savoir que grâce à un appui financier annuel accordé à l’ITRA, l’institut peut désormais produire et distribuer les semences de nouvelles variétés enregistrées. « Cette autonomisation financière et technique permet de réduire considérablement les coûts récurrents et d’atténuer les risques liés aux chaînes d’approvisionnement internationales. Finis les retards de livraison, les problèmes de qualité ou les fluctuations de prix liées aux importations », s’est réjoui Dr Boma.
Assurer une souveraineté génétique au pays
Pour Dr Tchala, coordonnateur régional SSG, Afrique de l’Ouest et du Centre, derrière les aspects techniques contenus dans ce partenariat se cache une vision. Celle d’unephilosophie profonde de la souveraineté génétique. « Un système semencier construit sans souveraineté du matériel génétique contient intrinsèquement les germes de son échec. Il ne s’agit pas seulement de produire des semences, mais de maîtriser l’ensemble de la chaîne génétique pour garantir une agriculture durable et indépendante », a-t-il affirmé. Dr Tchala a précisé que le partenariat SSG-ITRA ne représente pas seulement à un progrès technique, celui-ci incarne une nouvelle vision de l’agriculture africaine, où la souveraineté alimentaire passe par la maîtrise des ressources génétiques. « En sécurisant l’accès aux lignées parentales, le Togo se donne les moyens de transformer durablement son secteur agricole », a-t-il expliqué.
Le représentant du SSG a également fait savoir que ce partenariat avec l’ITRA repose sur trois composantes stratégiques qui garantissent sa pérennité. « D’abord, l’intégration de la gestion stratégique du germoplasme au cœur du mandat institutionnel de l’ITRA, assurant ainsi une approche à long terme de la conservation et de l’amélioration génétique. Ensuite, le renforcement des compétences techniques en matière de production de semences hybrides grâce à des protocoles spécialisés, permettant aux équipes togolaises de maîtriser les technologies les plus avancées. Enfin, l’alignement sur la mission de l’AGRA visant à promouvoir des systèmes semenciers résilients face au climat et centrés sur les producteurs, garantissant que les innovations profitent directement aux agriculteurs », a-t-il relevé. Selon Dr Tchala, l’ambition du programme dépasse les frontières du Togo, car le SSG a prévu de reproduire ce modèle de transfert de matériel génétique pour d’autres cultures vivrières stratégiques, et potentiellement dans d’autres pays africains confrontés aux mêmes défis. Ce processus est d’ailleurs déjà en cours en Sierra Leone et en Côte d’Ivoire, où des initiatives similaires ont été lancées. « Cette approche intègre également les retours des producteurs dans le processus de sélection variétale, créant un cercle vertueux entre recherche et terrain qui assure l’adéquation des innovations aux besoins réels », a-t-il souligné.
Yves T. AWI
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