
Le ministre des Affaires étrangères, de l’Intégration régionale et des Togolais de l’Extérieur, Pr Robert Dussey, a présidé, le mercredi 3 septembre 2025 à Lomé, la rentrée diplomatique de l’année 2024-2025, marquée par une conférence publique portant sur le thème « Nouvelles rivalités géopolitiques et autonomie stratégique de l’Afrique ». Ont pris part à la rencontre des personnalités diplomatiques, politiques et universitaires, ainsi que des acteurs de la justice, de la société civile, etc.

… le ministre Rober Dussey.
La rentrée diplomatique 2024-2025, effectuée a discuté des questions brûlantes, très importantes pour le devenir du continent africain. Dans son allocution d’ouverture, le ministre des Affaires étrangères, de l’Intégration régionale et des Togolais de l’Extérieur, Pr Robert Dussey, a fait savoir que le monde, caractérisé par des bouleversements profonds et une résurgence des rivalités géopolitiques, oblige l’Afrique à se mettre en capacité d’interagir de façon autonome avec les différents acteurs. Consciente de cet enjeu et travaillant au service d’une Afrique debout, définissant elle-même les termes de son rapport avec le reste du monde et jouissant d’une autonomie d’action dans un environnement international de forte rivalité, la diplomatie togolaise a inscrit au rang de ses priorités la question de l’autonomie stratégique de l’Afrique. Le ministre a, au nom du Président du Conseil, réitéré l’engagement de la diplomatie togolaise à toujours œuvrer pour la cause africaine et également à défendre les intérêts du continent. Il a invité les diplomates togolais à garder le cap et à redoubler de courage au service du Togo et des causes africaines.
Tous regardent vers l’Afrique
Au cours de la conférence inaugurale de cette rentrée diplomatique, l’orateur, l’honorable Abderaman Koulamallah, ancien ministre des Affaires étrangères du Tchad et sénateur, a indiqué que les pays africains se trouvent au centre de ces conversations. Mais, ce qui est nouveau, c’est que l’Afrique elle-même se transforme. Elle n’est plus l’Afrique passive et silencieuse d’hier, elle est portée par une jeunesse exigeante, consciente de ses droits, connectée aux dynamiques du monde. Cette quête de souveraineté est au cœur des changements récents au Sahel, à Bamako, à Ouagadougou et à Niamey, où de nouveaux dirigeants ont émergé, portés par une opinion qui dit qu’elle recherche l’indépendance. « Cette expérience m’a convaincu que la marche vers la souveraineté africaine est désormais irréversible. Ce réveil africain survient au moment où de grandes puissances multiplient leur présence sur notre continent. La Russie a fait un retour spectaculaire au Sahel, où elle associe l’opération militaire et l’exploitation des ressources nucléaires. Les Etats-Unis, eux, ont réactivé leur vieux réflexe stratégique. Quant à la Chine, elle est désormais incontournable. Plus de 200 milliards de Dollars d’échanges commerciaux s’effectuent à travers des ports, des chemins de fer… Mais tout cela occasionne, en contrepartie, une dette africaine qui suscite des inquiétudes. La France, pour sa part, traverse une crise profonde en Afrique. Contestée dans le Sahel, obligée de se retirer du Mali, du Burkina Faso, du Niger, puis du Sénégal et de la Côte d’Ivoire, elle a perdu, en quelques années, une présence militaire qu’elle considérait comme structurante. Il appartient donc à Paris de repenser sa politique africaine sur de nouvelles bases », a laissé entendre le conférencier.

Les membres du corps diplomatiques et autres personnalités.
A côté de ces acteurs historiques, de nouveaux venus avancent. La Turquie a ouvert plus de 40 ambassades en 15 ans. Turkish Airlines dessert plus de 60 villes africaines et ses drones Bayarat-Tar sont désormais utilisés en Ethiopie, au Niger et au Burkina Faso. Les Emirats arabes unis, le Qatar et l’Arabie saoudite investissent dans les ports et terres agricoles africaines. L’Inde et le Brésil cherchent à renforcer leur présence. Tous regardent vers l’Afrique, parce qu’ils savent que le continent concentre l’essentiel des ressources stratégiques du futur : lithium, uranium, pétrole, gaz, etc.
Investir massivement dans notre avenir
De l’avis de l’orateur, les Africains doivent investir massivement dans leur avenir. Cela suppose consacrer au moins 5% du PIB à l’éducation et 1% à la recherche et à l’innovation, afin de donner aux jeunes les outils pour être des acteurs de la révolution numérique et technologique. Cela suppose aussi de développer une infrastructure panafricaine de calcul et des applications d’intelligence artificielle adaptées aux réalités, notamment dans le domaine de la santé, de l’agriculture, de la gestion climatique, des langues nationales… « En Afrique, ce qui fait défaut, ce ne sont pas les ressources directives, mais la capacité de faire des choix stratégiques partagés et durables. Nous parlons beaucoup de l’Union Africaine, de ses visions et de ses programmes, mais il faut avoir le courage de dire que nous restons trop souvent au protocole. L’agenda 2063 est rempli d’ambitions, mais il peine à développer une feuille de route appliquée. Trop de comités régionaux se superposent aux institutions de l’Union Africaine, sans réelle coordination. Et au lieu de bâtir une puissance collective, nous entretenons la dispersion et l’inefficacité. Pire encore, il existe entre nos Etats des profondes divergences politiques. Certains pays s’enlisent dans des conflits qui paralysent toute intégration régionale. D’autres refusent d’engager des processus démocratiques crédibles, privant leurs peuples de la confiance et de la stabilité nécessaire au développement », a-t-il laissé entendre.

Diverses personnalités à la rentrés diplomatique 2025
Pour que l’Afrique assume, enfin, son destin, il faut une génération de véritables révolutionnaires de la gouvernance, du travail, de la rigueur et du courage politique. Ce sursaut est indispensable, car « si nous ne parvenons pas à transformer l’Union Africaine en un instrument efficace, pragmatique et crédible, nous continuerons à rester prisonniers des tutelles déguisées et des dépendances extérieures », a conclu le conférencier, l’honorable Abderaman Koulamallah.
Komla GOKATSE
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