Politique

La Constitution de 1992 : De la nécessité d’une mutation consensuelle pour évoluer

Vue partielle des participants au colloque
La Constitution de 1992 : De la nécessité d’une mutation consensuelle pour évoluer

 Les travaux du colloque international de Lomé sur «les vingt-cinq ans de  la Constitution de la IVe République du Togo, 14 octobre 1992-14 octobre 2017» ont été poursuivis, le 14 octobre, à Lomé par deux panels. Les échanges, qui ont porté sur  le thème central «la Constitution de 1992 à l’épreuve du temps : statu quo ou mutation ?», ont  regroupé diverses personnalités du monde politique, des universitaires et de la société civile. Ils ont permis  d’éclairer la lanterne sur l’enjeu d’une révision de la Constitution de 1992 ou la réécriture d’une autre loi pour une Ve République, vu que cette constitution de 1992 a fait son temps et traîne en son sein  des  lacunes au sens juridique.

Des questionnements et inquiétudes fusent dans les milieux de droit public et politique, ces deux derniers mois, marqués par la crise socio-politique  que traverse le Togo. Une crise politico-constitutionnelle qui mérite la conjugaison des pensées pour  trouver une issue, en vue d’un ordre de paix sociale, de  justice  et de liberté.

A cet effet, le débat politique  est saisi  par le droit  lors des panels du colloque international de Lomé  sur les vingt-cinq ans de la Constitution de la IVe République du Togo. Cette rencontre scientifique a  réuni plusieurs acteurs de la vie socio-politique du Togo, ainsi que des chercheurs et universitaires du Togo et d’ailleurs, autour du sujet  «la Constitution de 1992 à l’épreuve du temps, statu quo ou  mutation ?». Au cours des échanges, on a constaté que tous les panelistes ont été unanimes pour une mutation de la Constitution de 1992 vu l’évolution du temps car, il est dangereux de rester dans la «religion d’une Constitution» qui s’inscrivait dans le temps d’un renouveau  démocratique.

Dans une synthèse  des  travaux, le  Pr. Alain Ondoua  de l’Université  de Poitiers (France) a  relevé  qu’il n’existe sans doute point de Constitution qui  échappe à la révision. Mais  aussi, la question est de  savoir si la Constitution de 1992 se mesure-t-elle  au temps  actuel?

Il a précisé que le choix judicieux est de faire en sorte que la  crise  soit réglée par une  voix  consensuelle des acteurs  politiques.

M. Ondoua a estimé que soit on privilégie l’idée de consolider la  loi, la  réviser  ou la  changer,  faire  une  réécriture. De même, parlant de la rétroactivité de la loi, il a indiqué que le droit est clair, une loi est un  contrat social qui dispose pour l’avenir et donc sur  cette question, le respect des principes  constitutionnels est de mise mais, pour toute  circonstance, il faut explorer la meilleure  conciliation  possible et surtout éviter la «précipitation constitutionnelle». Par ailleurs, réviser, modifier ou  rétropédaler une Constitution, ne règle pas tout, car il n’existe pas une bonne Constitution.

Pour finir, Pr. Ondoua a souligné que les acteurs doivent discuter et  passer, dans le cas échéant, de la «démocratie d’autorisation à la démocratie  d’exercice et de confiance». Mais, ce qui est   essentiel, c’est de faire en sorte que les citoyens se  retrouvent à  travers  «une  démocratie sociale».

Quelques interventions

Dans l’esprit du sujet relatif au rétropédalage de la Constitution, à sa révision consensuelle ou par voie  référendaire, les positions des intervenants ont été  unanimes.

Selon le président national du CAR et ancien Premier ministre, Me Yaovi Madji Agboyibor, il faut des réaménagements à cette Constitution que de réécrire  une  nouvelle ou de chercher à passer à une  nouvelle  République. Aussi, la crise actuelle, a-t-il précisé, tire sa cause de la révision constitutionnelle de  décembre 2002 et parler de Référendum, il n’en est pas question. «Le principe est simple. Il suffit d’une abrogation des articles modifiés en 2002 pour que le calme  revienne», a  soutenu  Agboyibor.

Pour le président national de OBUTS, ce sont des  problèmes sociaux (chômage), des situations de vie  précaires des populations qui ont exacerbé cette  crise.  «Je ne suis pas pour le Référendum, car le pays  brûle, la paix sociale est menacée  et il ne faut pas attendre longtemps. C’est la voie du dialogue qu’il faut, ce n’est pas de trop comme le pensent  certains». Il a signifié que ce qui se passe aujourd’hui, trouve ses responsabilités partagées tant pour le pouvoir que pour l’opposition. Selon lui, «la polémique ne se  poserait pas si en 2014, les gens avaient accepté accorder un dernier mandat à Faure, la révision serait faite et on en serait pas là».

Le président national du NET, M. Gerry Taama, a  également relevé que l’histoire de la Constitution  au Togo a toujours été une question de modulation pour des raisons partisanes. Il explique que la Constitution de 1992 par exemple a été écrite  sur mesure selon une circonstance. «Elle n’est pas parfaite et aujourd’hui, elle a fait son temps et elle doit évoluer ou on va à une Ve République. S’agissant d’un Référendum sur la question, on n’en a pas besoin et avec ces  ressources on peut régler des problèmes dans les Centres Hospitaliers et autres problèmes liés au travail. Il faut trouver un cadre de discussion à l’Assemblée nationale et que les différents acteurs  revoient  leurs  positions», a dit  M. Taama.

Les Prs. Kossivi Hounaké de l’Université  de Lomé, Fabrice  Hourquebie  de l’Université  de  Bordeaux, Adama  Kpodar  de l’Université   de Kara  et  Nadine  Machikou de l’Université Yaoundé 2, entre autres, ont  noté  avec de pertinents exemples  que  le retour  de la Constitution de 1992 ne devait pas  être d’actualité. La crise n’est pas politique, mais sociale. Une  Constitution ne peut régler un tel problème social. La question du référendum aussi  pose  problème car,  sur quel texte faut-il se fonder? L’essentiel, c’est d’aller  aux compromis  sur la loi, discuter car, la discussion reste un principe de la démocratie.

L’autre réflexion débattue a été celle relative au régime politique et il n’y a jamais eu un régime  politique meilleur. Ce qu’il faut, c’est un exécutif bien  encadré avec des  institutions  fortes. Quel que soit  le régime politique, il faut toujours aller aux  négociations et aux  compromis pour  évoluer.

Jules LEMOU

 

 

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