Les résultats de l’Enquête par Téléphonie Mobile (ETM), réalisée par l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques et Démographiques (INSEED), sur la pauvreté des ménages à Lomé, sont au menu d’un atelier de présentation, ouvert hier à Lomé. Dénommée « A l’écoute de Lomé », cette étude est réalisée avec l’appui de la Banque Mondiale, afin de disposer des données actualisées devant aider à suivre l’évolution des conditions de vie des ménages et à mieux orienter les décisions en matière de lutte contre la pauvreté. Au total, 560 ménages ont été couverts par cette enquête sur 10 modules renseignés et apurés. Entre autres, renseignements, il se dégage que le risque de pauvreté diminue avec le niveau d’instruction et qu’il importe de lutter contre le sous-emploi.
La réduction de la pauvreté a été de tout temps l’une des préoccupations au premier plan des gouvernements, qui s’efforcent à initier des actions avec des objectifs. Conscient que ces derniers ne peuvent être atteints qu’à travers la connaissance et la maîtrise parfaite des facteurs du fléau de pauvreté, le gouvernement togolais, avec l’appui de la Banque mondiale, a initié un projet d’enquête, visant « l’analyse des déterminants de la pauvreté multidimensionnelle en milieu urbain : cas de la commune de Lomé ».
Démarrée en février 2014, l’étude, toute aussi innovante, consistait à réaliser l’Enquête par Téléphonie Mobile (ETM) sur la pauvreté des ménages à Lomé. Intitulée « à l’écoute de Lomé » l’étude par ETM est à sa phase pilote au Togo et une première en Afrique francophone, après des cas de réussite dans les pays anglophones. Elle constitue un outil développé par la Banque mondiale pour le suivi des conditions de vie des ménages. Elle a permis de collecter la quantité d’informations minimum nécessaire à l’identification et à la classification des groupes cibles. Des données collectées fournissent les indicateurs de base de bien-être, permettant de faire le suivi des programmes de lutte contre la pauvreté.
L’enquête a pris en compte 10 modules qui ont été renseignés et apurés. Ces modules sont relatifs à l’éducation, à l’inclusion financière, à la cohésion sociale, à l’accès à l’électricité, au transport et à la sécurité alimentaire.
Les conclusions de l’étude
L’étude ETM a dégagé des résultats touchant l’ensemble des modules. Concernant la cohésion sociale, l’étude révèle qu’à Lomé, plus de quatre personnes sur cinq (86,3%) font partie d’un groupe ou d’une association. La plupart des Loméens se confient à leur famille pour la prise de décision importante de leur vie (64% des enquêtés). D’autre part, les radios et télévisions constituent les principales sources d’information des habitants de Lomé. Au cours des douze derniers mois, 22,2% des enquêtés ont déclaré avoir contribué financièrement et par leur temps à la construction ou à l’entretien des locaux publics.
Au point inclusion financière, l’enquête révèle que deux enquêtés sur cinq ont un compte en banque. Cette proportion est plus élevée chez les hommes que les femmes. Parmi eux, la plupart font au plus deux fois des dépôts bancaires. La non possession de compte est due au manque d’argent ou de moyens pour 4 personnes enquêtées sur cinq. L’enquête montre, d’autre part, que moins de la moitié des individus (44,42%) ont emprunté de l’argent, soit chez un membre de la famille, ami ou collègue (64,13), soit à la banque et autres institutions financières (19,28% pour les coopératives et 17,04% pour les institutions de microfinance). Par ailleurs, 51,12% des enquêtes ont utilisé ces prêts pour régler une urgence, 33,63% pour se procurer la nourriture et 30,49% pour des raisons de santé.
Pour ce qui concerne l’éducation, l’enquête révèle que dans le Grand Lomé, quatre individus sur cinq sont alphabétisés. Cette proportion est relativement plus élevée chez les hommes que chez les femmes (9 hommes sur 10 contre 7 femmes sur 10). La majorité des élèves/étudiants fréquentent les écoles privées (61,2%).
Sur d’autres points liés au transport, l’étude atteste que le principal moyen de transport des Loméens est la moto et le transport en commun. Seul 5% utilisent le véhicule personnel. Concernant l’habitat, l’on note que six ménages sur dix vivent dans une maison en location à Lomé contre trois sur dix dans leur propre maison. Les principales sources d’énergie pour la cuisson sont le charbon de bois, suivi du gaz.
L’enquête sur la sécurité alimentaire révèle qu’au cours des douze derniers mois, 56,4% des ménages de Lomé ont connu une pénurie de nourriture, avec une proportion relativement plus élevée dans les foyers dirigés par les hommes.
Par ailleurs, l’étude note au point eau-installations sanitaires et hygiène que la principale source d’approvisionnement en eau potable des ménages à Lomé est le puits tubé ou encore forage (47,4%). Les types de toilettes les plus utilisés sont les chasses d’eau/chasse manuelle et latrine avec une dalle. Relativement au travail, l’enquête ETM montre que plus de 80% des enquêtés ont une activité non agricole gérée par eux-mêmes ou par les membres de leurs ménages. Une personne sur cinq est employée contre un salaire, alors que les principales branches d’activités demeurent le commerce et les services à la personne.
En somme, environ 40% de la population est considéré comme pauvre au vue des dimensions prises en compte. Le sexe du chef de ménage et le ratio de dépendance n’influencent pas significativement le risque de pauvreté à Lomé, même si leurs effets sont positifs. Le risque de pauvreté augmente avec la taille de ménage, l’âge du chef et l’indice de peuplement. Ce risque diminue avec le niveau d’instruction, le nombre d’heures de travail par semaine du chef de ménage, l’accès à l’électricité et la possession des biens durables comme la télé et le réfrigérateur.
Au vu des résultats, l’étude recommande la couverture totale de la ville de Lomé et ses périphéries en termes d’électrification, de distribution d’eau potable et d’encouragement à leur accès. Il faut aussi la prise en charge des dépenses de santé des personnes âgées et la lutte contre l’exode rural.
L’importance de l’enquête ETM
A l’ouverture de l’atelier, le directeur de cabinet au ministère en charge de la Planification du Développement, M. Essohanam Edjeou a rappelé l’importance de l’enquête ETM dans la poursuite des études démographiques et autres. La représentante résidente de la Banque mondiale au Togo, Mme Joelle Busïnger, dans ce sens, a dit que pour cette enquête par interview assistée par l’outil électronique (enquête par CAPI), l’INSEED a été doté d’un centre d’appel et de 600 téléphones portables avec abonnement, distribués d’une manière aléatoire aux ménages.
A cet effet, le directeur général de l’INSEED, M. Kokou Yao N’Guessan a rappelé les avantages liés à l’enquête ETM, soulignant que les enquêteurs, au lieu de faire le déplacement de maison en maison, effectuent des appels directement à travers le centre d’appel, reçoivent des réponses qu’ils saisissent directement. Le programme de tabulation, conçu d’avance, permet de sortir les tableaux des indicateurs statistiques, dès la fin de la collecte, et de favoriser les analyses rapides des données.
A son avis, cet outil peut désormais être mis au service de tout opérateur désirant des données dans n’importe quel domaine de la vie sociale pour mieux se situer.
Bernardin ADJOSSE
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