La mise en œuvre du programme de réparations, piloté par le Haut Commissariat à la Réconciliation et au Renforcement de l’Unité Nationale (HCRRUN) se poursuit, pour le compte d’indemnisations des victimes non vulnérables du pôle d’Atakpamé. L’opération de ces indemnisations, lancée lundi 7 mai, au centre sociale de la ville d’Atakpamé, concerne, pour deux semaines, les victimes des préfectures de l’Amou, d’Akébou, de l’Ogou et de Wawa, les autres localités de cette région ayant été déjà servies. Ce geste symbolique vise à leur apporter la compassion de l’Etat et à apaiser les cœurs meurtris, dans le cadre de la justice transitionnelle.
« Ouvrons nos cœurs au pardon, à la réconciliation et à la paix », « ensemble, main dans la main, pour une réconciliation durable au Togo », « vivre ensemble… une nécessité ». Autant de messages de banderoles qui accueillent, dès leur entrée du centre social d’Atakpamé, depuis lundi, les victimes non vulnérables des violences à caractère politique, commises en 2005. L’étape d’Atakpamé, est la plus importante, en termes de nombre de victimes non vulnérables, estimées à environ un millier, contre un peu moins de 2500 pour l’ensemble du pays. Elle fait suite à celle de la région Maritime pratiquement finie. Les indemnisations sont recommandées par la Commission Vérité Justice et Réconciliation(CVJR), en tant qu’un geste symbolique, destiné à faire taire les traumatismes des victimes, à les amener à pardonner leurs bourreaux et à tourner les pages douloureuses du passé, pour construire le Togo dans la réconciliation et la paix. L’Etat, en le faisant, leur reconnait officiellement un statut de victimes des événements politiques déplorables qu’a connus le pays.
De ce fait, la présidente du HCRRUN Mme Awa Nana-Daboya, a rappelé l’esprit de ces indemnisations, qui ne peuvent supplanter, ni le pied coupé d’une victime, ni un œil crevé, ni ramener à la vie un être disparu. Elles viennent donner réconfort, faire taire l’esprit de haine et de vengeance pour aller de l’avant. Il faut l’accepter comme tel, dans un esprit de tolérance et de la crainte de Dieu, le juge suprême. « Ce processus d’indemnisation est un acte fort, posé par le Chef de l’Etat. Nous avons pardonné, mais nous n’avons pas oublié. Par cet acte, je ne me sens plus victime, parce que si je me sentais victime, je serais toujours malade. Ça s’est passé en 2005 et aujourd’hui on est en 2018, il faut tourner la page et regarder l’avenir avec l’espoir qui ne trompe pas… Aujourd’hui, si on reconnait que nous sommes victimes, je pense que c’est une bonne chose. Mais seulement, il faut prier le Seigneur pour que ça ne se répète plus…. Plus jamais ça sur la Terre de nos aïeux », a déclaré M. Koffi Yordoh, un enseignant d’anglais victime, aujourd’hui, admis à la retraite. Selon lui, il faut toujours pardonner, enterrer la hache de guerre, quelle que soit la blessure, regarder l’avenir, qui seul compte.
Pour l’instant les indemnisations se passent bien. Seule fausse note, beaucoup de victimes ne disposent pas de pièces d’identité pour faire valoir leur droit et le HCRRUN a dû accepter la carte d’électeur, pour surmonter ces difficultés. L’institution invite, de ce fait toutes les victimes à commencer par s’établir des pièces d’identité, parce que les cartes d’électeur ne sont pas toujours fiables, surtout lorsqu’il s’agit de percevoir l’argent à la banque. Les banquiers se sont retrouvés, à certains endroits, avec des homonymies non bénéficiaires de ces indemnisations qui se font par la remise de chèques bancaires. Chaque victime reçoit un chèque, dont la valeur a été fixée d’avance par la CVJR, suivant un standard international.
Du reste, la mobilisation des victimes a été remarquable à Atakpamé, où il y avait, au lancement, de nombreuses personnalités, dont le président de la CVJR, l’archevêque d’Atakpamé, Mgr Barrigah-Benissan Nicodème, l’ancien Premier ministre, Me Joseph Koffigoh et autres.
Bernardin ADJOSSE
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