L’invasion de l’Ukraine par la Russie a provoqué un choc économique mondial qui touche l’Afrique subsaharienne, au moment où les pays de la sous-région disposent d’une marge d’action restreinte, voire inexistante, pour y faire face. L’édition d’avril 2022 du rapport sur les perspectives économiques du Fonds Monétaire International (FMI) présentée, ce 21 juillet 2022, à Lomé, par le représentant résident du Fonds, Maximilien Kaffo, répertorie trois canaux de transmission de ce nouveau choc sur les économies de la sous-région : Les prix de l’énergie, des produits alimentaires et le coût du financement. Ce rapport propose des solutions conséquentes à court terme, pour gérer l’impact de ce choc sur les économies de la sous-région. Il identifie aussi des réformes qui peuvent être mises en œuvre à moyen et long termes, pour pouvoir favoriser une reprise économique plus soutenue et durable. Le rapport fait l’analyse du rôle que pourra jouer la communauté internationale pour accompagner les pays de l’Afrique subsaharienne à renforcer leur résilience, afin de favoriser une croissance beaucoup plus remarquée.
La présentation du rapport du FMI sur les perspectives économiques régionales pour l’Afrique subsaharienne, hier, a connu la présence des cadres du ministère de l’Economie et des Finances, les partenaires techniques et financiers, des acteurs de développement, de la société civile et du secteur privé. Ce rapport touche du doigt les conséquences de la guerre russo-ukrainienne sur l’évolution des économies en Afrique au Sud du Sahara, tout en proposant des solutions de sortie de crise.
En effet, la reprise économique en Afrique subsaharienne a été plus prononcée que prévu au second semestre de 2021. D’où, une révision en forte hausse de l’estimation de croissance de l’an dernier, passée de 3,7 % à 4,5 %. Cette année, en revanche, ce regain de vigueur est hypothéqué par la guerre russo-ukrainienne, qui a provoqué un choc économique mondial. Selon le rapport sur les perspectives économiques du Fonds Monétaire International (FMI) d’avril 2022, intitulé « Un nouveau choc, une faible marge de manœuvre », l’envolée des prix du pétrole et des denrées alimentaires pèse, en particulier, sur les soldes extérieurs et budgétaires des pays importateurs de produits de base et accentue les craintes à l’égard de la sécurité alimentaire dans la région. En outre, le choc menace d’aggraver certains problèmes particulièrement préoccupants de la zone, notamment les séquelles sociales et économiques de la pandémie de COVID-19, les changements climatiques, les risques sécuritaires accrus dans le Sahel et le durcissement en cours de la politique monétaire aux Etats-Unis. Tous ces facteurs expliquent pourquoi la dynamique de croissance de l’Afrique subsaharienne s’est essoufflée cette année, avec une croissance de l’activité économique qui devrait s’établir à 3,8 %. Selon le FMI, la reprise économique devrait s’accélérer, en 2023, pour atteindre environ 4 % à moyen terme. Mais, ce rythme de croissance n’est pas suffisant, pour regagner le terrain perdu en raison de la pandémie.
Protéger les ménages vulnérables contre l’envolée des prix
Outre une accélération de la campagne de vaccination contre la COVID-19, certaines priorités d’action se dégagent à savoir : protéger les ménages les plus vulnérables contre l’envolée des prix de l’énergie et des denrées alimentaires, sans accroître la vulnérabilité liée à la dette, contenir les tensions inflationnistes et gérer les ajustements des taux de change.
Au-delà de la pandémie et des tensions géopolitiques actuelles, il y a lieu de créer des emplois et de réaliser les objectifs de développement durable. En cela, il faudra que l’Afrique subsaharienne enregistre une croissance solide, inclusive et durable. Pour ce faire, les pouvoirs publics devront prendre des mesures résolues, afin de diversifier davantage leur économie et de libérer le potentiel du secteur privé. Ceci, en renforçant l’intégration, en mobilisant les financements et en améliorant l’inclusion financière via l’innovation numérique. Avec tous les besoins actuels induits par la pandémie et la crise en Ukraine, la sous-région aura besoin de tout l’appui qu’elle peut recevoir des partenaires techniques et financiers. Ainsi, le FMI s’engage à faire en sorte que les personnes les plus vulnérables bénéficient d’une aide financière suffisante.
D’importantes ressources ont financé les dépenses imprévues liées à la Covid
A l’occasion, le secrétaire général du ministère de l’Economie et des Finances, M. Agbénoxévi Kofi Paniah, a indiqué qu’en 2020, malgré le ralentissement généralisé que la plupart des économies du monde ont connu, en raison des effets de la pandémie de la Covid-19, l’économie togolaise a été résiliente, en affichant un taux de croissance de 1,8%. Ce niveau de croissance a été rendu possible grâce aux mesures de ripostes prises par le gouvernement pour limiter l’impact de la crise sanitaire. A cet effet, les efforts visant à contenir les effets de la pandémie de la COVID-19 ont conduit le gouvernement à engager d’importantes ressources, afin de financer les dépenses imprévues liées à la crise sanitaire. Ces dépenses ont porté essentiellement sur l’acquisition du matériel sanitaire pour le dépistage et la prise en charge des personnes infectées par la COVID-19. L’on note aussi la mise en place des actions visant à soutenir le pouvoir d’achat des ménages, en particulier les couches les plus vulnérables. Ceci, à travers les transferts monétaires numériques innovants du programme « Novissi » qui a touché près d’un million de Togolais. Les efforts engagés concernent également la prise en charge des tranches sociales de consommation d’eau et d’électricité, l’octroi de crédits aux producteurs agricoles, en vue de soutenir la production agricole et de maintenir l’autosuffisance alimentaire. M. Paniah a aussi souligné que ces efforts ont contribué à soutenir le secteur privé, notamment les PME/PMI. Soutien réalisé à travers des mesures d’allègement fiscales, les reports d’échéances fiscales pour toutes les entreprises qui ont exprimé le besoin, la suspension de l’application des sanctions fiscales en cas de redressement fiscal, l’adoption de mesures de soutien à la consommation, à la production et à la sauvegarde de l’emploi, etc. Toutes ces mesures ont permis d’atteindre un taux de croissance de 5,5% en 2021, contre une prévision de 4,8%.
Une série de mesures face à la guerre en Ukraine
De l’avis du secrétaire général, la crise en Ukraine et la menace terroriste dans l’extrême Nord du Togo risquent d’entraîner un ralentissement de cette dynamique de croissance enclenchée, l’an dernier. Pour limiter l’impact de cette crise à la fois sur les finances publiques et sur les populations, le gouvernement a pris une série de mesures conséquentes, depuis le début de la guerre en Ukraine. Il s’agit, entre autres, de la subvention accordée aux produits pétroliers, la suspension de la TVA et le plafonnement des prix de certains produits alimentaires importés, l’interdiction d’exportation des produits locaux de première nécessité comme le maïs, la subvention des engrais pour la campagne agricole 2022-2023 et la suspension de la Taxe sur les véhicules à moteur (TVM).
S’agissant spécifiquement de la menace terroriste dans l’extrême Nord du pays, M. Paniah, a fait comprendre que le gouvernement ne cesse de mener des efforts pour lutter contre ce phénomène qui entrave la sécurité des personnes et des biens. A cet effet, l’état d’urgence sécuritaire a été a décrété dans la Région des Savanes, une mesure d’exception qui vise à maîtriser la situation et à assurer la protection des populations, afin de leur garantir l’exercice de leurs activités économiques et professionnelles.
En 2022, précise-t-il, l’activité économique bénéficie de l’exécution encore plus affirmée des projets et réformes de la feuille de route gouvernementale 2025. La mise en œuvre des réformes structurelles de l’économie et l’instauration d’un climat des affaires attractif se poursuivent, afin d’attirer plus d’investisseurs privés et de réaliser les objectifs de croissance soutenue et inclusive.
Tout en remerciant le FMI, le secrétaire général a lancé un appel pressant à l’ensemble des partenaires techniques et financiers, le secteur privé et la société civile, à maintenir et à renforcer leurs appuis en faveur du Togo, afin de sortir de cette impasse qui entrave son développement économique et social.
A l’issue de la présentation du rapport, les débats ont été ouverts, modérés par le secrétaire permanent chargé des politiques de réformes, M. Stéphane Akaya. Des échanges qui ont permis aux uns et aux autres de mieux appréhender la quintessence de ce rapport du FMI.
Komla GOKATSE
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