Le président de la Haute Autorité de l’Audiovisuel et de la Communication (HAAC), M. Pitalounani Télou a remis, cet après-midi, au Premier ministre le plan stratégique quinquennal (2019-2023) de modernisation de l’institution de régulation des médias au Togo. Cette remise fait à l’atelier national d’adoption ce document tenue dans la matinée à l’Hôtel 2 Février. Les travaux d’adoption ont regroupé divers acteurs autour des cinq axes stratégiques de ce plan quinquennal de la HAAC. Un plan qui vise à renforcer les capacités de cette instance de régulation et sa modernisation pour un environnement médiatique ouvert et propice à la liberté de la presse et au renforcement de l’Etat de droit au Togo.
Instance de régulation des médias et de la Communication, en général au Togo, la HAAC, créée au début des années 1990, a pour rôle constitutionnel de garantir et d’assurer la liberté et la protection de la presse et des autres moyens de communication de masse. Elle veille au respect de la déontologie, en matière d’information, de communication et à l’accès équitable des partis politiques et des associations aux moyens officiels d’information et de communication. Mais, avec l’évolution des technologies et l’avènement de nouveaux médias, l’institution se trouve, aujourd’hui, confrontée à une multitude de défis à relever, afin de remplir efficacement sa mission. En effet, l’institution fait face à l’imposition du passage de l’analogique au numérique depuis 2006, et à l’insuffisance de ressources matérielles et des équipements. Ce qui ne lui permet pas de répondre efficacement aux impératifs et évolutions de sa mission de régulation sur l’ensemble du territoire. Outre ces défis, une étude diagnostique a permis de relever quelques constats majeurs : une faible notoriété institutionnelle, une régulation limitée à Lomé et ses environs, la publicité, la communication et les vidéoclubs sont hors de contrôle. De même, la HAAC fait face à un paysage médiatique bipolarisé et aligné, au moment où la liberté de presse est pleine, mais sans souci de responsabilité. D’où la nécessité de réformer en profondeur cette instance de régulation, pour lui ouvrir de nouveaux horizons, mais aussi et surtout, pour l’avenir de la presse togolaise. C’est dans cette dynamique qu’est intervenue l’adoption, hier, d’un plan stratégique 2019-2023. Ceci, au moment où le pays s’est engagé dans des réformes à travers le Plan National de Développement (PND). Plan qui fait une place de choix à la communication.
A l’agenda des travaux qui ont conduit à l’adoption du plan stratégique, un exposé sur « le plan stratégique de modernisation de la HAAC : des axes stratégiques au plan d’actions : vision, mission, valeurs, orientations, actions, enjeux et défis ». Il y a eu aussi une présentation des grandes orientations du plan d’actions suivie d’échanges et débats pour contributions et consolidation du plan d’actions, ainsi que des échanges et partages d’expériences avec les instances de régulation de la sous-région à savoir : la HAAC du Bénin et le Conseil Supérieur de la Communication du Burkina Faso.
Du reste, ce plan stratégique comprend cinq axes. Le premier axe consiste à consolider le développement institutionnel par une restructuration de la HAAC, prenant en compte la réorganisation des cadres administratif et financier. Le deuxième axe vise à consolider la régulation par la couverture du territoire national, par la décentralisation des services de la HAAC déclinée en antennes régionales pour améliorer sa capacité réelle d’action. Le troisième axe a pour but de consolider les cadres d’exercice et les capacités des professionnels et gestionnaires des médias, de la communication et de la publicité. Le quatrième axe entend améliorer le cadre interrelationnel avec les acteurs du secteur des médias et de la communication. Le dernier axe ambitionne d’améliorer l’image de marque de l’institution et de renforcer sa notoriété institutionnelle.
Pour le consultant, M. Maurille Agbokou, une chose est d’avoir un plan, une autre est de le mettre en œuvre. Car, sa mise en œuvre suppose des moyens qui ne sont pas que financiers et économiques. En effet, « Si la HAAC ne s’entend pas avec les médias, les gestionnaires de vidéoclubs, etc. La mise en œuvre de ce plan sera difficile. Le second enjeu est de penser, de plus en plus, à la place des femmes dans les médias et organes de direction qui en comprennent très peu. L’autre enjeu concerne l’évaluation, à chaque étape de la mise en œuvre de ce plan, pour voir où on en est et ce qu’il faut corriger, en vue de consolider, et non laisser à la fin pour faire le bilan », a relevé M. Agbokou.
Mettant fin aux travaux de cet atelier, le Premier ministre Komi SelomKlassou, s’est réjoui de l’initiative de la HAAC de se doter d’un plan stratégique assorti d’un cadre d’actions pour les cinq prochaines années, afin de se donner les moyens de faire des médias et de ceux qui les animent, de véritables acteurs de développement. Il a rappelé, à cet effet, que la liberté de la presse et de la communication est un ciment de l’efficacité de l’action publique, dès lors qu’elle est exercée avec professionnalisme, responsabilité, conscience, objectivité et neutralité. Valeurs essentielles à la presse pour promouvoir la tolérance, le vivre ensemble, la cohésion nationale comme fondements de la démocratie dans le pays. Pour le Premier ministre, «les mesures de pédagogie contenues dans le plan stratégique doivent permettre à la HAAC, face aux dérives éventuelles des médias, de trouver des réponses adaptées à chaque conscience, à chaque expérience et à chaque contexte».
Pour cela, a-t-il déclaré : «il me plaît encore d’insister sur les défis du professionnalisme, qui passe par la formation, mais aussi la question de l’éducation aux médias, pour permettre progressivement aux publics consommateurs de messages d’avoir une posture critique par rapport aux images et informations reçues». Il a, pour cela, invité tout un chacun à approfondir les réflexions sur les nouvelles technologies de l’information et de la communication, sur le multimédia qui, certes comportent beaucoup d’opportunités, mais engendrent aussi des travers dans la qualité de l’offre informationnelle, dont l’accès est malheureusement incontrôlé. M. Klassou a, pour finir, félicité les acteurs de la presse, ainsi que les organisations des médias qui se sont déjà engagés sur la voie de la vulgarisation du PND.
Le coordonnateur résident du Système des Nations Unis au Togo, M. Damien Mama, a relevé la portée de cette initiative soutenue par la volonté et l’engagement du gouvernement à donner à la HAAC tous les outils nécessaires à la réussite de sa mission. Ceci, en vue de contribuer effectivement et efficacement à la réalisation de l’Effet 1.10 du PND, qui vise la transformation du paysage médiatique. «Dans un contexte international de plus en plus marqué par les discours incitant à la violence, à la haine et au mépris de l’autre, réussir la régulation de la communication, c’est semer les graines de la paix à travers la promotion des valeurs de tolérance et de responsabilité dans la jouissance des libertés individuelles. Les évolutions technologiques et la multiplication des plateformes et outils de communication rendent la régulation difficile et parfois controversée. C’est pourquoi, l’approche de concertation large utilisée par la HAAC dans la définition de son plan stratégique est à saluer et encourager», a précisé M. Mama.
Il a surtout félicité la HAAC qui a compris qu’il faut se concentrer sur un nombre limité de priorités et promouvoir les collaborations nécessaires pour un espace médiatique transformé. Selon lui, les cinq axes vont permettre de rendre l’institution plus performante et plus crédible pour mieux servir les acteurs des médias, garantir la jouissance des libertés et promouvoir la contribution des médias à la paix et au développement durable.
Le président de la HAAC, M. Pitalounani Télou, s’est réjoui du soutien du gouvernement, sous l’impulsion du chef de l’Etat, à la mise en œuvre dudit plan. «En remerciant les agences du système des Nations Unies, je voudrais leur lancer un appel à la mobilisation en faveur de la HAAC, des fonds nécessaires à la mise en œuvre du plan stratégique», a signifié le président de la HAAC.
Après avoir exprimé la gratitude de son institution au PNUD et aux instances de régulation sœurs du Bénin et du Burkina Faso, M. Télou a appelé les membres de la HAAC à s’approprier ce plan stratégique et à s’investir pleinement dans le processus de mise en œuvre des réformes aux côtés du gouvernement, notamment en terme de mobilisation des médias pour la vulgarisation du PND.
Blandine TAGBA-ABAKI
Jules LEMOU
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