Assemblée Nationale

La Cour des comptes et le statut de ses magistrats réorganisés par deux nouvelles lois

Les députés à l'unanimité des présents ont voté favorablement ces deux lois
La Cour des comptes et le statut de ses magistrats réorganisés par deux nouvelles lois

Les parlementaires réunis jeudi 7 octobre 2021, au siège de la Représentation nationale, ont voté deux projets de loi portant, d’une part, organisation et fonctionnement de la Cour des comptes et des Cours régionales des comptes et, d’autre part, statut des magistrats de ces cours. Ces lois visent à renforcer les capacités de ces cours et à inciter les magistrats qui y siègent à cultiver l’excellence et le professionnalisme. Les discussions législatives de cette plénière, qui comptent pour la 5e séance de la 2e session ordinaire de l’année, ont été dirigées par la présidente de l’Assemblée nationale, Mme Yawa Djigbodi Tségan, en présence du ministre en charge des Relations avec les Institutions de la République, M. Christian Trimua.

Le vote de Mme Yawa Djigbodi Tségan

Selon l’exposé des motifs, la Cour des comptes est créée par la Constitution de 1992 pour contrôler les comptes des comptables publiques et s’assurer de la bonne gestion des deniers publics. Son organisation et son fonctionnement sont fixés par la loi organique du 10 juillet 1998. Le projet de loi y relatif soumis, jeudi dernier à la plénière, comporte 6 titres, 10 chapitres et 134 articles. Il est une reprise de la loi organique de 1998, plus de 20 ans après sa mise en application. Une reprise rendue nécessaire pour intégrer les innovations introduites dans le titre VII de la Constitution de 1992 par la loi du 15 mai 2019 et les nouvelles attributions qui lui sont confiées par les textes pris par le Togo dans le cadre de l’internalisation des nouvelles directives du cadre harmonisé des finances publiques dans l’espace UEMOA. Mais aussi, pour prendre en compte les normes exigées pour toutes les Institutions supérieures de contrôle des finances publiques (ISC) au plan mondial, à travers l’Organisation internationale des institutions supérieures de contrôle (INTOSAI), d’une part, et corriger les insuffisances constatées dans sa mise en application, d’autre part. A cet effet, il a été mis en place un comité qui a procédé à la relecture de ces textes, des documents enrichis par les missions d’échange d’expérience dans la sous-région et ailleurs en Afrique.

Le contenu de cette loi 

Ainsi, ce projet de loi prévoit l’extension des attributions de la Cour, en y ajoutant l’évaluation des politiques publiques, l’émission d’avis sur les rapports annuels de performance, le contrôle des visas des contrôleurs financiers et le contrôle de la gestion des responsables de programme, entre autres, l’énonciation et l’affirmation de l’indépendance de la Cour et son autonomie financière et de gestion, afin de respecter les normes de l’UEMOA et de l’INTOSAI. Les règles d’organisation et de fonctionnement des Cours régionales des comptes créées par la loi du 15 mai 2019 portant modification de certains articles de la Constitution de 1992, avec précision des attributions, la compétence juridictionnelle de la Cour et des Cours régionales des comptes, en matière de discipline budgétaire et financière, le système de mandats renouvelables dans la limite d’âge de 65ans pour les magistrats de la Cour des comptes et des Cours régionales des comptes, sont également prévus par ce projet de loi.

Le ministre Christian Trimua a remercié les élus du peuple pour l’adoption de ces lois

D’autres dispositions également attendues

En vue de permettre à la Cour de faire face à ses nouvelles attributions et pallier les insuffisances constatées, d’autres dispositions sont également attendues. Elles concernent le déplafonnement de l’effectif total des magistrats et son relèvement, l’assouplissement de la composition des formations délibérantes, l’obligation pour la Cour d’auditer annuellement ses propres comptes et de faire évaluer périodiquement ses performances par les pairs ou par la Cour des comptes de l’UEMOA. Ces dispositions sont relatives aussi à l’obligation pour la Cour de communiquer sur ses méthodes de travail, ses activités et de publier ses rapports et décisions, à l’introduction de la prescription extinctive de l’action publique en matière de gestion de fait et de fautes de gestion et à la consécration d’une disposition aux cas des exceptions d’inconstitutionnalité.

Encadrer la situation administrative des magistrats dans un système de carrière

Le second projet de loi portant statut des magistrats de la Cour des comptes et des Cours régionales des comptes vient remplacer la loi organique du 15 avril 2009 sur le statut des magistrats de la Cour des comptes. Articulé autour de 6 chapitres répartis en 46 articles, il a pour but d’encadrer la situation administrative des magistrats dans un système de carrière, alors que ces magistrats ont été nommés dans un régime de mandat à durée déterminée, sans possibilité d’évolution en échelon, ni en grade. Alors ce projet de loi, tout en consacrant le système de mandat, tel que prévu par la nouvelle loi organique portant organisation et fonctionnement de la Cour des comptes et des Cours régionales des comptes, prévoit une évaluation annuelle des magistrats, afin non seulement d’inciter ceux-ci à cultiver l’excellence et le professionnalisme. Mais aussi, de prendre en compte les exigences des normes internationales devant régir les magistrats des ISC, tant au niveau mondial qu’au niveau de l’UEMOA. Il s’inspire pour l’essentiel du statut des magistrats de l’ordre judiciaire, quant aux principes généraux, mais s’en distingue en ce qui concerne les conditions et le mode de recrutement.

Par ailleurs, pour renforcer le contrôle sur les magistrats et la discipline qu’ils doivent observer, ce projet de loi étoffe les dispositions relatives à la composition, à l’organisation et au fonctionnement du Conseil supérieur de la Cour des comptes, contenues dans la précédente loi organique.

Les parlementaires unanimes au vote de ces lois

Donnant la consigne de vote à ses collègues, le président du groupe parlementaire UNIR, M. Aklesso Atcholé, a indiqué que l’adoption de ces lois permettra de renforcer la gouvernance de la Cour des comptes, véritable auxiliaire de la démocratie, situé à équidistance entre le gouvernement et le parlement et qui constitue le vrai miroir de la régularité de la gestion de la République. Occasion pour lui de saluer le leadership et la clairvoyance du chef de l’Etat pour son attachement aux réformes et à la modernisation des institutions, surtout pour sa politique régionale en matière d’intégration économique et son souci permanent de hisser plus haut le Togo dans le concert des nations.

Pour le représentant du groupe UFC, M. Komi Agbanu, les deux projets de loi adoptés renforcent les attributions et les capacités de la Cour des comptes, en ce sens qu’à son rôle traditionnel de contrôle de l’action publique vient s’ajouter l’évaluation des politiques publiques. Une attribution importante qui permettra de mesurer le chemin parcouru et, au besoin, de détecter et corriger les insuffisances observées. Aussi, se réjouit-il que ces lois favorisent un alignement et une intégration des normes et pratiques nationales avec celles de l’UEMOA et s’inscrivent dans la continuité des réformes institutionnelles et constitutionnelles entreprises ensemble depuis 2019.

Tout en se félicitant que le processus de décentralisation et de déconcentration prenne, enfin son envol à travers l’adoption de ces lois, le responsable du groupe NET-PDP, M. Gerry Taama, a émis des réserves par rapport au délai de leur mise en œuvre et à l’installation des tribunaux administratifs régionaux qui restent un autre compagnon de la décentralisation. « Car si la justice administrative n’accompagne pas la décentralisation, c’est comme labourer un champ, l’ensemencer et ne pas le sarcler, la récolte en pâtira », a relevé M. Taama.

Renforcer l’indépendance de la Cour des comptes

Remerciant les députés, le commissaire du gouvernement, M. Christian Trimua, a signifié qu’en adoptant ces deux lois organiques, « vous dotez la Cour des comptes et les Cours régionales des comptes de leurs instruments juridiques de travail, d’une part et permettez à notre pays de se conformer au nouveau cadre harmonisé des finances publiques dans l’espace UEMOA, ainsi qu’aux normes exigées pour toutes les Institutions supérieures de contrôle des finances publiques au plan mondial, d’autre part. L’adoption de ces deux textes permet également de renforcer l’indépendance de la Cour des comptes et de conforter cette haute institution dans sa mission d’assistance, de conseil et de contrôle des comptes publics pour une gestion toujours plus vertueuse et une utilisation optimale des ressources de l’Etat ».

A la fin de la plénière, la présidente de l’Assemblée nationale, Mme Yawa Tségan, a salué la participation de l’ensemble des députés qui a permis le vote de ces deux projets de loi qui vont améliorer les missions des Cours de comptes, dont l’une consiste à appuyer la fonction de contrôle budgétaire de la Représentation nationale.

 

Blandine TAGBA-ABAKI

 

 

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