Les journées de purification du pays, initiées par le gouvernement dans son engagement visant à réconcilier les Togolais, se sont poursuivies, vendredi, par une prière musulmane dite par les fidèles d’Allah à la grande mosquée de Lomé. Le chef de l’Etat, Faure Essozimna Gnassingbé, qui attache un intérêt particulier pour la réconciliation du pays, en vue de son émergence, a tenu personnellement à être présent à cette prière. Il y avait également le Premier ministre, Komi Selom Klassou, qui a assisté, ce dimanche, un culte dit, dans ce cadre, par le Conseil et Mission des Eglises Charismatiques du Togo (COMECTO), en la Chapelle Internationale de la Faculté de Théologie des Assemblées de Dieu du Togo (ESTAO), à Atikoumé, à Lomé. Que ce soit vendredi ou ce dimanche, on notait à ces offices religieuses, la présence des présidents des institutions de la République, des membres du gouvernement, des officiers supérieurs des Forces Armées Togolaises (FAT) et d’autres personnalités, tant religieuses, traditionnelles que politiques.
En Afrique et ailleurs, il est généralement recommandé que tout événement qui a conduit à des pertes en vies humaines soit suivi de prières de purification pour éviter la répétition. C’est dans l’esprit de cette recommandation bien connue de tous que les fidèles musulmans ont répondu favorablement à la demande du gouvernement de s’associer aux prières de purification visant à débarrasser le Togo du poids de sang versé lors des violences à caractères politiques, depuis 1958 à 2005. A cet effet, ils se sont fortement mobilisés, vendredi dernier, à la mosquée centrale de Lomé, pour l’apothéose de leurs prières, qui se sont simultanément dans toutes les préfectures du pays.
Plusieurs personnalités, avec au premier rang le président de la République, Faure Essozimna Gnassingbé, étaient aux côtés des dignitaires de la religion islamique, pour ce moment solennelle d’invocation d’Allah, en vue de l’effacement des pêchés. Tout a commencé par une minute recueillement en mémoire de tous ceux qui ont perdu leur vie, suite aux violences politiques. Une chorale islamique, exécutée dans une ambiance de méditation profonde, a été suivie du sermon, fait par l’imam Abdoulatif Mako, pour clôturer la lecture des 114 sourates (chapitres) du Saint Coran, récité dans la matinée. Les fidèles étaient de tout cœur dans la prière, à travers leur attitude fortement religieuse. Ils ont par la suite prié à travers une série d’invocations en Cotokoli, Ewe et en Français. Pour l’essentiel, ils ont prié pour la paix, la sécurité au Togo. Ils ont invoqué Allah, le Tout miséricordieux, pour le pardon des fautes et pêchés, tout en lui demandant de fermer la voie à la souffrance des Togolais et de leur éviter des morts subites et des accidents. Les officiants, notamment les imam Agoro Zakari Sani Karim et Nawanou Moutawakilou ont, par ailleurs, prié pour qu’Allah assiste le chef de l’Etat et l’ensemble de tous ceux qui ont en charge la gestion du Togo, afin qu’ils prennent de bonnes décisions pour le développement du pays. Dans un message de circonstance, le président de l’Union Musulmane du Togo, El Hadj Inoussa Bouraïma, a fait savoir que déjà, lors du jeûne du mois béni de Ramadan, les prières avaient commencé dans le sens de la réconciliation des Togolais et que les 114 sourates du Saint Coran ont été récitées ce vendredi matin dans le compte de ces journées de purification. Il demandé à Allah d’unir les cœurs de tous les Togolais et de bénir le Togo.
Le culte chrétien
C’est dans la communion de foi que les chrétiens, fidèles et adeptes des différentes confessions religieuses ont massivement pris part, ce dimanche, à la célébration d’un culte chrétien, placé sous le thème « Dieu veut bien guérir son peuple et son pays ». « Jésus je viens, je viens à toi, je viens à toi tel que je suis, prends moi », c’est le chant repris en chœur par toute l’assemblée, comme pour formuler le vœu de tout le peuple togolais et sa volonté de revenir à Dieu. Sinon, comment envisager sa relation avec Dieu et avec les autres, lorsque l’on a conscience d’avoir blessé, trahi, manqué de respect et d’amour à son prochain ? C’est la confession que les chrétiens, réunis à l’ESTAO, ont fait au Seigneur, au nom de la population entière. Ceci, afin de recevoir son pardon, pour que la réconciliation, tant souhaitée et attendue, soit effective entre les filles et fils du Togo. Car, depuis 1958, les Togolais se sont fait du mal les uns contre les autres. Dans sa prédication du jour, le révérend pasteur, Mitré Djakouti, s’est inspiré de l’Evangile de St Marc, au chapitre 12, verset 28 à 34. Il a relevé que venir confier nos actes qui nous ont éloignés du chemin du bonheur, du vivre ensemble entre frères et sœurs d’une même Nation, à celui qui nous aime plus que tout et qui n’a jamais cessé de nous aimer, c’est lui demander de nous mettre debout et de retrouver ce chemin du bonheur qu’il veut pour nous. Venir dire cette souffrance, c’est accepter l’invitation de Dieu qui nous libère de ce qui nous empêche de vivre sereinement. Pour le célébrant, c’est à travers ce processus que le pardon de Dieu est possible. Ainsi, a-t-il poursuivi, recevoir le pardon, c’est dire oui à Dieu qui nous ouvre un nouvel avenir pour le Togo, celui d’une vie restaurée dans son amour. « C’est accepter la main qu’il nous tend, la main d’un Père infiniment aimant que la séparation avec son enfant affecte et vouloir être digne de cet amour en plaçant à nouveau sa confiance en lui, en accompagnant nos actes par la prière », a-t-il dit. Pour lui, ce pardon nous permet de repartir le cœur léger, en paix, plein de reconnaissance, de reconstruire notre relation avec les autres et de s’engager dans une vie nouvelle, pour bâtir ensemble le Togo. « Comme deux êtres qui se sont pardonnés éprouvent le besoin de s’embrasser pour se dire leur joie, nous aussi nous pouvons montrer à Dieu notre joie de ces retrouvailles. Notre prière et nos efforts sont les signes que nous offrons à Dieu, pour témoigner de son pardon», a-t-il précisé. Dans sa prière d’intersection, le révérend Djakouti a demandé à Dieu d’éclairer les autorités du pays dans leur mission, difficile mais, exaltante qu’est de diriger le Togo. « Il suffit d’être père de famille et de gérer la femme et les enfants, pour mesurer les difficultés qu’il y a de diriger tout un pays », a-t-il souligné. Il a, pour cela, encouragé tous ceux qui ont la charge de conduire le Togo de se confier au Seigneur, qui seul, peut les aider à prendre de bonnes décisions, pour mieux accomplir leurs devoirs. « La démarche de venir demander le pardon, est d’abord l’occasion d’une rencontre. Comme toute rencontre, elle commence par quelques mots pour se connaître, manifester sa joie de faire connaissance ou de se retrouver. Cet accueil mutuel entre deux personnes, est à l’image de ce qui s’est passé dans toutes les rencontres qu’a faites Jésus pendant sa vie. Les Togolais doivent se rencontrer, se mettre ensemble pour avancer vers l’avenir. C’est comme cela qu’on peut développer ce pays et le léguer aux générations futures. Ce n’est pas oublier ce qui s’est passé mais, il ne sert à rien aussi de ressasser continuellement les douleurs du passé », a confié Didier, un chrétien à la sortie du culte.
Bernardin ADJOSSE
Yves T. AWI
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