En attendant que la Cour constitutionnelle proclame les résultats définitifs de l’élection présidentielle du 22 février 2020, les réactions et les commentaires vont bon train. Qui, pour approuver et saluer la victoire écrasante, dès le 1er tour, du président sortant, Faure Essozimna Gnassingbé (72,36% des suffrages exprimés). Qui, pour décrier ce résultat appelant à la mobilisation et à la résistance contre cette victoire. Qu’à cela ne tienne, la vie a repris son cours normal, depuis lundi, à Lomé et dans les autres villes de l’intérieur du pays où les populations font preuve d’une lucidité en refusant de sortir dans les rues pour casser et piller préférant vaquer à leurs occupations quotidiennes. Pour elles, l’élection présidentielle est derrière. Ce qui compte c’est la reprise du travail et le développement du pays.
Pendant que des gens continuent d’alimenter le débat sur les réseaux sociaux, dans les journaux, et dans d’autres cercles, les Togolais attendent impatiemment le verdict final de la Cour constitutionnelle, sur l’issue de l’élection présidentielle du 22 février 2020. Pour l’heure, ils vaquent librement à leurs occupations. Les administrations publiques et privées sont ouvertes et fonctionnent normalement. Les grands marchés d’Adawlato et de Hédzranawoé, ainsi que les marchés secondaires à Lomé s’animent comme d’habitude. Les magasins de commerce, les boutiques et étalages de rues et des points névralgiques aussi sont animés comme d’habitude. Bref, les activités des uns et des autres ont repris normalement dès le lendemain de la proclamation des résultats provisoires par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI).
Selon M. Agbévivi Kodjo agent de vente dans une quincaillerie au quartier commercial Assivito à Lomé, « plusieurs constats peuvent être faits par rapport à cette situation plutôt inhabituelle au Togo, après une élection présidentielle. Les résultats provisoires ont été jusque-là proclamés plusieurs jours après la tenue du scrutin, même si le délai légal est respecté. Et les Togolais étaient aussi habitués à des moments de peur et de suspicion qui ont bloqué les activités et forcé les habitants à rester chez eux en attendant d’être dissuadés ». Ainsi, la proclamation rapide des résultats provisoires du scrutin présidentiel de samedi 22 février dernier est-elle considérée par certaines opinions comme une prouesse dans la marche vers plus de démocratie, explique-t-il.
Par contre, d’autres, Kpondzo Yao Hilaire conducteur de taxi-moto, trouvent trop hâtive cette proclamation et pensent plutôt que la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), en le faisant ainsi, « a voulu camoufler quelque chose ».
Joie dans le camp des vainqueurs et déception chez les perdants
Dans l’opinion publique, beaucoup de militants, qui savourent ainsi la réélection, comme ils l’avaient prédit, au « Coup K.O », de leur candidat, évoquent un bilan largement positif de leur champion et l’adhésion de la grande majorité des Togolais à sa politique de développement.
« Cette victoire annonce l’avènement d’une nouvelle ère pour travailler davantage afin d’assurer le développement économique et sociale du pays. Nous avons besoin d’une gouvernance concertée, nous avons besoin de conjuguer davantage les énergies et les efforts parce qu’il faut amplifier les réalisations et les résultats. Parce qu’il s’agit d’intensifier le développement économique et sociale et d’offrir un bien-être partagée à l’ensemble de nos concitoyens », a déclaré Gilbert Bawara, ministre de la Fonction publique, cadre du parti Union pour la République (UNIR).
D’autres voix et acteurs politiques ont également un avis favorable sur les résultats provisoires de l’élection présidentielle du 22 février dernier et sur la victoire du chef de l’Etat sortant. « A notre avis, Faure a moins remporté les élections avec 72,36%, cela devrait être plus au vu de ce que les populations du septentrional ont voté généralement à plus de 85% le programme de Faure Gnassingbé, qui continue de m’enchanter personnellement », a laissé entendre M. Abass Kaboua, président du Mouvement des Républicains Centristes (MRC), hier, devant la presse.
D’autres, au contraire, sont déçus mais espèrent encore, à les entendre, que le candidat de la dynamique Mgr Kpodzro, M. Agbéyomé Kodjo, va leur donner la victoire qu’il avait promise d’arracher, durant la campagne électorale. Pour ceux d’entre eux qui sont plus éclairés, ils accusent l’opposition de division. « L’opposition togolaise dans son ensemble doit sa défaite cuisante, une fois encore, à ses querelles incessantes et à sa division face au candidat Faure Gnassingbé », a déploré Amékoudji Afiwa agent dans une société et militante de l’opposition.
Ce faisant, ils sont nombreux à avoir estimé qu’ils ne comptent pas répondre à l’appel à la mobilisation et à la résistance lancé depuis dimanche par l’un des candidats perdants Agbéyomé Kodjo et ses proches. « Nous sommes fatigués d’entendre le même refrain », a lancé Edem rencontré à Déckon pour marquer sa déception et celle de ses camarades du quartier commercial.
Notons qu’à l’approche de ce scrutin électoral, la Coalition de l’opposition (C14) qui avait fait de grandes mobilisations entre 2017 et 2018 s’est totalement effritée au fil des mois, minée par des dissensions internes. Ce regroupement de 14 partis politiques de l’opposition a été totalement enterré la veille de la présidentielle, où le « reliquat » (les cinq partis qui gardaient toujours la maison) a volé en éclat, certains dont la Convention Démocratique des Peuples Africains (CDPA) de Mme Brigitte Adjamagbo-Johson ayant apporté ouvertement leur soutien à M. Agbéyomé Kodjo.
« L’opposition s’est effondrée. Il faut inventer une nouvelle façon de faire de la politique. Les populations togolaises nous ont envoyés un message », a réagi, pour sa part, le président du Nouvel Engagement Togolais (NET), Gerry Taama, lors d’une conférence de presse, animée lundi, à Lomé. Et d’insister : « On ne peut plus continuer à faire les choses comme avant. Il faut changer les personnes qui animent la vie politique de l’opposition au Togo. Il faut changer de paradigme, d’approche politique… », face à la débâcle électorale des partis politiques qui s’opposent au pouvoir en place.
Unanimité des missions d’observation sur la transparence et la régularité du scrutin
Dans l’ensemble, les groupes de missions d’observateurs internationaux ont salué la bonne tenue de ce scrutin présidentiel et appelé les candidats au respect des résultats. « Cette présidentielle s’est déroulée dans un contexte global apaisé », a noté la mission d’observation électorale de l’Union Africaine (UA), conduite par l’ancien président malgache Hery Rajaonarimampianina, exhortant les acteurs politiques et l’ensemble des parties prenantes à « continuer d’œuvrer pour préserver la paix, la stabilité » du Togo. Ceci, dit-t-il, « afin de consolider la démocratie et l’Etat de droit ».
De son côté, la mission d’observation de la CEDEAO a invité les candidats à « respecter les résultats issus des urnes et proclamés par les institutions et organes chargés des élections ». Même son de cloche du côté de la mission d’observation du groupe des observateurs de la Communauté Sahélo-Saharienne (CEN-SAD), pour qui cette présidentielle du 22 février « s’est déroulée dans les conditions optimales de transparence, de crédibilité et de régularité et de façon inclusive ». Au total, 280 observateurs internationaux ont été déployés sur l’ensemble du pays, le jour du scrutin.
Du reste, les Togolais, qu’ils soient dans les marchés ou à leurs lieux de travail, souhaitent que le calme et la sécurité tant recherchés dans les pays voisins continuent de régner, afin que leurs activités se déroulent normalement et qu’ils puissent gagner de la pitance pour nourrir leurs famille et contribuer au développement du pays.
Martial Kokou KATAKA
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