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Interpellé par  l’Assemblée nationale,  le gouvernement s’explique sur l’affaire Bolloré  

Le ministre des Infrastructures s'explique devant les députés
Interpellé par  l’Assemblée nationale,  le gouvernement s’explique sur l’affaire Bolloré  

L’Assemblée nationale a tenu jeudi 28 juin, à son nouveau siège, sa 9eme séance plénière de la première session ordinaire de l’année 2018. Cette séance dirigée par le président de l’institution M. Dama Dramani a été consacrée aux questions d’actualité  au gouvernement relatives à l’affaire Bolloré. C’est le ministre des Infrastructures et des Transports, représentant le gouvernement M. Ninsao Gnofam, qui a donné les éclaircissements nécessaires aux élus du peuple, en présence du Garde des Sceaux, ministre de la Justice, Pius Agbetomey.

Les députés ont exercé jeudi dernier, leur deuxième fonction, celle du contrôle de l’action gouvernementale, en interpellant le gouvernement par rapport aux questions d’actualité relatives à l’affaire Bolloré. Selon les courriers des honorables Jean Kissi et Isabelle Manavi Ameganvi adressés au gouvernement, le nom du Togo est cité dans le scandale judicaire qui se déroule autour de la garde à vue puis de la mise en examen de M. Vincent Bolloré. En effet, depuis le 25 avril 2018, sur la base de documents saisis par la police française en 2016, lors d’une perquisition au siège du groupe Bolloré, à Puteaux, la justice française met en examen (inculpe) M. Vincent Bolloré, propriétaire de Bolloré Africa Logistics, pour « Corruption d’agents publics étrangers, complicité d’abus de confiance, complicité de faux et usage de faux », relatives à des contrats conclus respectivement en 2016 et en 2011 pour la gestion des ports de Lomé et de Conakry. Ceci a amené ces députés à poser au gouvernement certaines questions telles que « la nature et le contenu du contrat par lequel le Groupe Bolloré a acquis le port de Lomé », « la procédure suivant laquelle la concession du port a été attribuée au Groupe Bolloré », « le détail des investissements de Bolloré au Togo », « Quels sont les montants annuels des redevances versées par la société Bolloré Africa Logistics, au Trésor public, depuis 2016, au titre des contrats la liant à l’Etat togolais », etc. en vue d’une meilleure compréhension du problème.

Dans sa réponse, le ministre des Infrastructures et des Transports, M. Ninsao Gnofam a, d’entrée, expliqué que l’Etat togolais n’a pas à opiner sur les décisions émanant d’autorités judiciaires d’un Etat étranger. La mise en examen de M. Vincent Bolloré par un juge d’instruction français, a-t-il dit, a été décidée dans le cadre d’une procédure pénale française à laquelle les autorités judicaires togolaises n’ont pas été associées au titre de l’entraide judiciaire internationale. « Il va de soi que si à l’avenir la justice française entendait coopérer avec la justice togolaise, suite serait donnée dans le respect des textes applicables en matière de la coopération judiciaire. L’Etat togolais, a souligné le ministre, n’entend pas faire plus de commentaires sur cette affaire. Toutefois, il convient de rectifier la fausse idée largement répandue selon laquelle le groupe Bolloré serait « propriétaire » du Port Autonome de Lomé. « Nous tenons à dire tout haut que le groupe Bolloré est une concessionnaire de certaines activités au même titre que d’autres opérateurs tels que Lomé Conteneurs Terminal ou même le Port Autonome de Lomé. Le groupe Bolloré n’a donc pas acquis le Port Autonome de Lomé (PAL) qui demeure la propriété de l’Etat ».

S’agissant de la procédure par laquelle la concession a été attribuée à Bolloré, le ministre a expliqué que ledit groupe a obtenu ses droits de concessions portuaires en 2001 et 2003 dans le cadre de l’ouverture de l’exercice des activités portuaires dans le PAL aux opérateurs privés et qui fut décidée à l’époque par le gouvernement. Le groupe Bolloré n’a pas été le seul bénéficiaire de cette ouverture puisque le groupe d’opérateurs GETMA/NECOTRANS avait également obtenu une concession accordée au groupe Bolloré l’ont donc été en 2001 et 2003. La première convention signée en août 2001 portait sur les activités de manutention des conteneurs. Elle a été modifiée en 2010 pour tenir compte de nouveaux investissements supplémentaires réalisés par le concessionnaire. La seconde convention de 2003 (décret 2003-15/PR du 10 avril 2003/portait sur les activités dites de « manutention conventionnelle » soit le matériel roulant et les marchandises non conteneurisées c’est-à-dire qui arrivent en vrac. La convention de 2003 avait été modifiée en 2009 par des aménagements purement techniques. Le ministre Gnofam a expliqué que le décret n°201-162/PR du 14 septembre 2001 « fixant les conditions de mise en activité de manutention au PAL » pose le cadre général de l’octroi des convexions. C’est ainsi que les changements intervenus en 2009 et 2010 résultent de négociations contractuelles assises sur des droits existants depuis 2001 et 2003. S’agissant du 3eme quai, le ministre a dit qu’il a été construit sur une jetée qui faisait partie de l’emprise accordée en 2001 au groupe Bolloré et a nécessité un investissement de plus de 150 milliards de FCFA justifiant pleinement l’octroi d’une durée de concession plus longue. Le groupe Bolloré est donc présent sur le PAL, depuis 2001 par voie de concessions légalement accordées, a souligné le ministre.

A propos du conflit entre M. Dupuy Dauby et le Groupe Bolloré, le ministre a fait savoir qu’il s’agit d’un conflit entre employé et employeur et qu’il serait inexact de prétendre que M. Dupuy Dauby a perdu le PAL au profit du Groupe Bolloré. Pour information, ce conflit avait donné lieu à deux décisions judiciaires en 2006 et 2009. Et les transferts d’actions effectués illégalement par M. Dupuy Dauby au détriment du groupe Bolloré avaient été annulés par les juridictions togolaises qui avaient condamné le sieur Dupuy Dauby à 36 mois de prison ferme pour faux, abus de confiance et escroquerie au détriment du groupe Bolloré. Le ministre a, par ailleurs, expliqué aux élus du peuple que le régime fiscal, dont relève le groupe Bolloré, est tiré de l’article 1476 du Code Général des Impôts, à l’instar d’autres groupes internationaux comme Contour Global ou SCANTOGO ayant réalisé plus de 150 millions de USD d’investissements en République togolaise. Aucune faveur ne lui a été accordée. « Il est important de relever que les activités du groupe Bolloré au Togo génèrent des revenus à l’Etat (trésor public) et directement au PAL. Ainsi, pour la période 2001, date de la signature de la première convention de concession, le groupe a versé (à la date du 30 avril 2018), au titre des impôts et taxes plus de 14 milliards de FCFA, au PAL plus de 84 milliards de FCFA. Le Tout pour un chiffre d’affaires cumulé de près de 370 milliards de FCFA et des investissements cumulés de près de 170 milliards. Par ailleurs, à la date du 30 avril 2018, le groupe emploie 838 Togolais contre 141 à l’entrée du groupe dans notre pays », a-t-il dit.

Pour terminer, le ministre a fait savoir que le groupe Bolloré n’a nullement le monopole des activités portuaires sur PAL. Le groupe MSC est présent à Lomé, depuis 2008, à travers la société LCT (qui n’est pas une société du groupe Bolloré comme souvent affirmé) et développe une très grande activité de  transbordement et aussi de transit à Lomé. La concurrence est ainsi très forte sur le marché de l’activité de la logistique des conteneurs.

Mélissa BATABA

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