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A l’Assemblée nationale : Les ministres de l’Agriculture et du Commerce donnent des éclairages sur leurs activités

Le ministre de l'Agriculture lors de son passage
A l’Assemblée nationale : Les ministres de l’Agriculture et du Commerce donnent des éclairages sur leurs activités

Les députés à l’Assemblée nationale ont tenu, jeudi, leur 9e séance plénière de la 1ère session ordinaire de l’année, dirigée par leur président Dama Dramani. Cette séance, consacrée aux questions orales au gouvernement, a interpellé deux ministres. Le ministre de l’Agriculture, de l’Elevage, de la Pêche et de l’Hydraulique, Col. Ouro-Koura Agadazi, sur la gestion des intrants agricoles, la mission et le fonctionnement de l’Agence Nationale de la Sécurité Alimentaire du Togo (ANSAT) et le ministre du Commerce et de la Promotion du Secteur privé, Mme Bernadette Legzim-Balouki, sur l’augmentation des prix des produits pétroliers et la nature juridique du comité chargé de l’importation des produits pétroliers au Togo. Questions sensibles auxquelles les deux membres du gouvernement ne se sont pas dérobés, en apportant toute la lumière pour convaincre l’Assemblée.

Selon le ministre Ouro-Koura Agadazi, interrogé sur la gestion des intrants agricoles, la mission et le fonctionnement de l’Agence Nationale de la Sécurité Alimentaire du Togo (ANSAT), la Centrale d’Achat et de Gestion des Intrants Agricoles (CAGIA), structure chargée des Intrants agricoles, notamment de l’approvisionnement du Togo en engrais, a connu une réforme en 2008, qui vise à satisfaire les besoins de consommation en intrants agricoles au niveau de la population agricole. Par rapport à cette réforme, le gouvernement a renforcé le personnel avec un recrutement et la formation des cadres de la CAGIA. Au-delà du renforcement des capacités de la CAGIA, il était question de mobiliser des ressources financières suffisantes pour couvrir les besoins des paysans. Dans ce sens, des commandes ont été faites de 2008 jusqu’en 2015, où le ministère a entrepris une profonde réforme dans le mécanisme de gestion des engrais  de façon à répondre, non seulement, aux sollicitations des paysans, mais aussi, à gérer le secteur de manière à atteindre les objectifs que le gouvernement a fixés au ministère, à savoir, porter le volume des stocks du simple au triple avec le souci d’améliorer la production et la productivité. Dans ce sens, il était nécessaire de composer avec le secteur privé dans la distribution des engrais. A cet effet, le mécanisme a eu l’appui du ministère de l’Economie numérique qui a mobilisé les 2 opérateurs de téléphonie mobile pour engager une réforme qui a fait du chemin au Nigéria. Il faut préciser que le Togo a été le tout premier pays francophone à amorcer cette réforme qui a produit des résultats, puisque de 30.000 tonnes couramment distribuées l’année dernière  le ministère, à travers la CAGIA, a pu engager 45.000 tonnes, ceci avec pour ambition d’atteindre 120.000 tonnes d’ici 2030. Donc, par rapport à la CAGIA, il y a eu d’autres intervenants, notamment des sociétés privées qui apportent leur concours.  La distribution a été caractérisée par un maillage du territoire avec d’autres points de vente créés, portant le nombre de 120 à 150. Pour l’année 2017-2018, il est prévu un élargissement en termes de couverture et de positionnement de l’engrais à tout point du territoire. C’est vrai qu’il y a eu des difficultés, l’année dernière, mais, comme toute réforme, il fallait s’attendre à des balbutiements. Mais, la dynamique a été lancée, suffisamment huilée pour faciliter l’acquisition des engrais sur le territoire national. Dans cette dynamique, cette année, il y a 22 sociétés qui approvisionnent le système de distribution des engrais. Mais, à la date d’aujourd’hui, il y a des intrusions qui sont venues malheureusement greffer le système que le ministère est en train de mettre en place avec des entrées du Ghana. Par rapport à cette situation, la CAGIA a été mobilisée pour détecter ces cercles véreux qui risquent de porter un coup dur à la réforme. En tout cas, a relevé le ministre Agadazi, cette action a été suffisamment appréciée, l’année dernière, et cette année, par les paysans.

« Nous savons qu’il y a des défis et c’est pourquoi, nous sollicitons encore le soutien des honorables députés pour nous faire remonter, si besoin en est, des informations collectées, afin qu’on puisse réagir pour éviter de réduire cette capacité d’éclatement de la distribution des engrais par les sociétés privées », a dit le ministre Agadazi. Il a souligné d’ailleurs, qu’                         un cadre de concertation a été monté au niveau du ministère de façon à ce que les sociétés privées, qui engagent des stocks, remontent les informations qu’elles jugent nécessaires pour parfaire cette réforme qui a de beaux jours devant elle.

Pour la filière cotonnière, l’année dernière, il y a eu une modification à la hausse des prix des engrais coton. Évidemment, la situation au niveau des engrais vivriers de l’année dernière a eu une incidence sur la gestion des engrais cotonniers, quand on sait que le coton s’installe dans la même zone que le vivrier, avec les mêmes acteurs. Il était question de modifier ce mécanisme de gestion ne serait-ce que dans son volet prix. C’est pourquoi, la Fédération Nationale des Groupements des Producteurs de Coton (FNGPSC), qui a engagé cette réforme aussi, a modifié les prix de façon à les arrimer à ceux des engrais vivriers. Il faut signaler que cette modification a été accompagnée d’une grande campagne d’information et de sensibilisation, à l’endroit du monde des cotonculteurs pour avoir leur adhésion et c’est à l’issue de cette campagne que les nouveaux prix ont été fixés, a expliqué Col. Agadazi.

La gestion de l’ANSAT

L’ANSAT a, quant à elle, connu aussi une réforme pour passer de l’observatoire qu’elle était à l’époque en agence depuis 2008. Donc, il fallait quitter le spectre de mobilisation des stocks pour travailler, non seulement, avec les paysans, mais aussi, tous les circuits de commercialisation, de manière à engager les produits togolais sur les marchés extérieurs, tout en préservant la sécurité alimentaire. L’équilibre des prix sur l’ensemble du territoire, avec une disponibilité remarquable des denrées en toute période et en tout point du territoire est une preuve que cette réforme a marché.

La ministre Bernadette Legzim-Balouki a, de son côté, répondu à la question relative à l’augmentation des prix des produits pétroliers et à la nature juridique du comité chargé de l’importation des produits pétroliers au Togo. Il est à rappeler que la dernière hausse des prix des produits pétroliers, le 27 février 2017, juste après celle du 28 janvier 2017, avait donné lieu à une manifestation spontanée qui s’est soldée par un mort par balle, plusieurs blessés graves et des personnes interpellées, ainsi que d’importants dégâts matériels. Pour la ministre Legzim-Balouki, la commercialisation des produits pétroliers au Togo se fait sur la base d’une structure des prix qui est fonction des coûts liés à l’importation des produits raffinés auxquels sont indexés, entre autres : les charges de dédouanement, les frais de passage aux structures de dépôts, les taxes communautaires, la marge des pétroliers ou encore des détaillants. Cette structure des prix à la pompe est élaborée par la Commission Technique du Comité de Suivi des Fluctuations des Prix des Produits Pétroliers (CT-CSFPPP) mise en place en 2010 et composée des représentants des ministères de l’Energie, des Finances et du Commerce, ceux du Patronat, des pétroliers, ainsi que des syndicats. Le Comité de Suivi des Fluctuations des Prix des Produits Pétroliers (CSFPPP) est, quant à lui, composé des ministres en charge du Commerce, de l’Energie, des Finances et d’un représentant de la Primature. Chaque mois, selon le mécanisme d’ajustement automatique des prix à la pompe des produits pétroliers, la CT-CSFPPP soumet un projet de structure des prix au CSFPPP pour décision. Le prix d’achat des produits pétroliers dépend du coût des produits raffinés liés au prix du baril et du taux de change du dollar correspondant à la période de facturation.

Trois facteurs à la base de la hausse des prix à la pompe

Selon la ministre, le Togo n’achète exclusivement que des produits raffinés, alors que le prix du baril ne concerne que le pétrole brut non encore raffiné. Il est à signaler à cet égard que toute variation des prix du pétrole brut n’a pas d’incidence majeure sur les prix à la pompe. Dans le contexte de la dernière augmentation, trois facteurs essentiels ont entraîné la hausse des prix des produits pétroliers à la pompe. Il s’agit de l’accord historique de l’OPEP, le 28 septembre 2016, où les membres se sont entendus pour limiter leur quota de production, afin de soutenir les prix du baril. Cet accord s’est traduit par une augmentation de plus de 20% du prix du baril. Au niveau du Togo, cet accord a eu pour conséquence l’augmentation des coûts d’importation de 6% à 26%, selon le type de produit. Le 2e facteur est le taux du dollar de règlement de la facture des traders. Le Togo est obligé d’acheter le dollar à un taux qui fluctue. Le constat est que le taux de change du dollar américain grimpe en même temps que les prix des produits sur le marché international. Dans ces conditions, le coût en FCFA des produits ne peut que flamber. Le dernier élément indexé est l’indisponibilité de creux de la Société Togolaise de Stockage de Lomé (STSL). En effet, depuis plus de 2 ans, le Togo est soumis à un programme de restriction des volumes à stocker du fait de la mise en maintenance des bacs. De ce fait, l’approvisionnement se fait à petit coût et entraîne des surcoûts dans la gestion logistique des importations auquels viennent s’ajouter des coûts de surestaries. Au-delà de ces facteurs, il y a lieu de signaler que plus de 5 milliards de FCFA sont inscrits au Budget 2017 comme subvention de l’Etat aux produits pétroliers et votée par l’Assemblée nationale. Mais, force est de constater que déjà, à fin février 2017, plus de la moitié de la subvention de l’année entière a été consommée, soit 2,68 milliards de FCFA.

Pour la ministre Legzim-Balouki, ce sont là, les éléments qui confortent le changement à la hausse des prix réels et, par conséquent, une augmentation des prix à la pompe des produits pétroliers.

Les débats ont permis, ensuite, de mieux clarifier la situation. Les députés ont demandé, à cet effet, au Comité de Suivi des Fluctuations des Prix des Produits Pétroliers (CSFPPP) de communiquer suffisamment autour de la question de la hausse ou de la baisse à la pompe des prix des produits pétroliers au Togo, ceci, en vue de mettre tout le monde d’accord et d’éviter les situations comme celle de février dernier.

Blandine TAGBA-ABAKI

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